Pendant que les rideaux rouges s’ouvraient pour que commence la soirée, les larmes de joie coulaient déjà sur certains visages. L’émotion était à son paroxysme dans la salle. Aïssata, «fan numéro 1 de Baba Maal», n’a pour rien au monde raté la célébration de ses 30 ans. Présente au Grand Théâtre dès les premières heures de la soirée, elle était l’une des plus joyeuses. «Je ne peux pas me retenir quand il chante du traditionnel… Surtout maintenant qu’il est en face de moi sur scène, ce que je ressens là où je suis, c’est inexplicable. Il m’inspire et me rend heureuse», souffle la jeune dame. Juste après quelques cris des inconditionnels du «roi du Yéla», marquant leur euphorie à la vue de leur idole sur scène, la salle est devenue toute calme pour apprécier les sonorités traditionnelles et les chants poular accompagnés par des instruments comme le hodou et la guitare entre autres. L’artiste sert son célèbre Bayoo. Une chanson qui ne laisse personne indifférent et qui a connu un grand succès en Europe.
Muni de sa guitare, il joue et chante en compagnie d’une voix reconnue et célèbre. Celle qui l’accompagne partout dans le monde, celle de son ami, de son compagnon de toujours, Mansour Seck, bien assis dans son canapé. Durant toute la soirée, ce dernier lançait avec émotion ses «walahi», au grand bonheur du public poular. Les morceaux s’enchaînent sur scène comme pour traverser le temps. Baba Maal fait revisiter ses morceaux phare. Ceux-là qui ont fait sa notoriété à travers le monde. Il reprend par exemple son morceau Lekki qui veut dire arbre ou la végétation. Il chante aussi son ami Malick Oumar Bayal Sow qui lui a offert un camion de bœufs dans la journée du samedi. Cette information a fait sensation dans cette salle où faire un tel don à une personne a son sens pour chaque Halpoular. A cet instant de la soirée, la majorité du public était fière et heureuse de voir le sang peul couler dans leur veine. Les cris de joie fusaient de partout et l’on dansait comme des forcenés aux rythmes des morceaux comme Bélinabé, Halaybé, Bagodine...
Pieds nus, dans une demi-saison bleue, Baba Maal a assuré le show toute sa soirée. Pas un moment de pause. Il l’a promis et la fait : un concert non-stop durant lequel il ne s’est pas lui-même privé de démonstrations de danse endiablée. Ce fut simplement un samedi de folie, une nuit pleine de bonheur pour l’ensemble de la communauté peul, mais surtout pour les fans du lead vocal du Dandé Leñol, Baba Maal. Ce dernier a été à l’occasion congratulé avec des billets de banque de différentes personnalités au rang desquelles Farba Ngom, Racine Sy, Aïssata Tall Sall, quelques ministres d’Etat, entre autres.
La voix des invités
Outre Youssou Ndour qui avait été annoncé, mais qui a fait faux bond, il y avait comme prévu sur scène de grands artistes à l’instar de Kiné Lam, le très acclamé Oumar Pène, Coumba Gawlo, Ismaïla Lô, Salam, le sportif El Hadj Diouf. Chacun d’eux a fait son show à sa façon. «Baba m’a toujours prêté son orchestre pour que je travaille. Et je l’ai amené partout. Je vois que tous les peuls sont fiers aujourd’hui d’avoir une personne comme lui qui est toujours prête à défendre sa tradition, mais surtout d’amener cette tradition partout dans le monde», a dit Kiné Lam qui n’a pas caché sa joie d’avoir été de la soirée. Très heureux, Baba Maal a pour sa part lancé en direction de Ablaye Mbaye : «Ablaye Mbaye, à partir d’aujourd’hui, je te fais mon fils. Tout ce que tu veux ou tu le souhaites, je suis avec toi. Je te porte dans mon cœur. Je t’ouvre toutes mes portes, mes maisons de production sont là. Tu viens quand tu veux et comme tu veux.»
Les musiciens qui pendant 30 ans ont donné «le meilleur d’eux-mêmes» selon le «roi du Yella» ont eu droit chacun d’eux à un trophée de reconnaissance et de fidélité. Ils étaient au nombre de 4, Mansour Seck son protecteur, Talla Faye son Sérère et compagnon de tous les jours, son instrumentiste Ilan Chavial et son fidèle tailleur Abdou Khadre Diack. Ils ont tous été témoins des 30 ans du Dandé Leñol.
Fier de ses origines : Keyssi Bousso magnifie «le prophète de la musique poular»
L’administrateur général du Grand Théâtre, M. Keyssi Bousso, un Poular de souche, était aux anges comme beaucoup de cadre de la région. «C’est une soirée extraordinaire pour la culture poulaar. Baba Maal a amené cette culture partout dans le monde. Je peux me permettre de dire qu’il est le prophète de la musique poular», a affirmé M. Bousso. Il faut signaler tout de même que la seule fausse note de la soirée reste le manque d’organisation interne au Grand Théâtre. Beaucoup parmi les spectateurs sont restés debout du début à la fin de la soirée par manque de places. Il y avait aussi le fait que certains, après avoir acheté des billets Vip, se sont retrouvés à des places de bas prix. Toutes les places d’honneur ont même été prises au grand regret de certains spectateurs qui s’en sont offusqués. D’autres par contre disent être conscients de l’ampleur de cette soirée attendue par toute la communauté peul et ont préféré vivre l’instant musique de leur idole. «Cette situation de salle archi-comble est compliquée à régulariser. Tant qu’on le fait à la manière africaine, cela va toujours être comme ça. Les gens préparent 1 800 cartes, ils vendent toutes les cartes alors qu’il y a des invitations déjà prévues. Ce qui fait qu’il y a toujours des débordements», a regretté l’administrateur du Grand Théâtre
LEQUOTIDIEN