Concernant le débat sur la réduction du mandat présidentiel en cours de 7 à 5 ans, comment comprendre que des voix discordantes se fassent entendre au sein de l’Alliance pour la République (Apr) alors que le chef de l’Etat, Macky Sall a déjà tranché ?
Attendez. Il faut qu’on précise certaines choses. Le président de la République a tranché ? Il n’a pas tranché. Il a dit qu’il va saisir le Conseil constitutionnel sur l’applicabilité de la réduction du mandat. Ce sont ses derniers mots. Il n’a pas dit sur l’application mais plutôt sur l’applicabilité. Attention, il y a une évolution sémantique. Donc, il faudrait reposer la question par rapport à la nouvelle donne.
Est-ce que le président essaie de lancer un ballon de sonde pour jauger l’état de l’opinion sur la question ?
Oui. Est-ce que le président essaie de lancer un ballon de sonde pour mesurer l’état de l’opinion, de la détermination de ses partisans et de ses opposants à l’accompagner ou à l’empêcher de réduire son mandat ? Evidemment, c’est la grande question. Effectivement, il y a une possibilité ou une probabilité que le Président essaie de mesurer l’état de l’opinion. Mais, cela néanmoins peut faire une certaine confusion dans l’appréciation d’une évolution sémantique dans l’engagement qu’il avait pris à réduire son mandat et à se l’appliquer lui-même. Maintenant, le problème est un peu plus complexe parce que le Président se détermine de moins en moins, de manière ferme, sur son engagement à réduire son mandat. Il ne l’a pas totalement nié. Il n’a pas indiqué qu’il ne va pas réduire son mandat. Mais, les formes de communication qu’il mène laissent croire que la détermination qu’il avait au début s’est un peu érodée et qu’aujourd’hui, on voit un Président beaucoup plus hésitant, beaucoup plus ambivalent dans son discours qu’un Président déterminé à réduire de manière irréversible son mandat. C’est pourquoi je dis que l’évolution sémantique qu’on peut percevoir dans son dernier discours quand il parle d’applicabilité en consultant le Conseil constitutionnel du mandat, me parait être l’illustration la plus flagrante de l’hésitation qui habite le Président dans sa détermination à réduire le mandat.
Mais pensez-vous que le chef de l’Etat veut clore le débat ou a la possibilité de clore le débat ?
Bien sûr que non. Ce débat ne concerne pas seulement son parti. L’Apr est partie prenante du débat parce que c’est le parti du président de la République. C’est probablement le parti qui doit être son premier soutien pour sa volonté à réduire son mandat. Donc, à ce niveau là, il ne devait y avoir aucune confusion, aucune hésitation, aucune interprétation possible de la détermination du président de la République et l’Apr aurait dû le suivre dans cette démarche. Or, à quoi assistons-nous ? Aujourd’hui, la plupart des gens de l’Apr sont opposés à la réduction du mandat. Il y a quelques voix qui tonnent et demandent au Président, malgré tout, de s’affranchir de tout rétropédalage de donner un contenu et un corps à son engagement. Mais, le débat traverse beaucoup l’Apr qui est même divisé.
Mais au delà de ça, ce n’est pas seulement l’Apr qui est concerné. C’est quand même tous les Sénégalais qui sont concernés. Parce que c’est eux qui doivent dire au chef de l’Etat dans quel sens ils voudraient qu’il aille dans sa volonté à réduire son mandat. Donc, ce n’est pas un calendrier personnel du chef de l’Etat. C’est un calendrier républicain, qui engage la Nation. Une Nation composée des populations et d’autres déterminants. Les Sénégalais attendent le moindre discours du Président pour qu’il nous indique quand est ce qu’il va consulter le Conseil constitutionnel ? Qu’est ce qu’il va faire de l’avis du Conseil ? Quand aura lieu le référendum ? Et quelles questions il posera aux Sénégalais ?
Dans sa déclaration à la Nation du 31 décembre, il nous a donné à peu prés le corpus des questions qu’il va poser aux Sénégalais par rapport au référendum, si référendum il y a. Evidemment, tous ces points-là ne peuvent pas être décortiqués par les Sénégalais. Il faudrait qu’il les résume de manière beaucoup plus ramassée pour que cette question sur le référendum soit compréhensible aux populations. Sur cette base là, qu’on puisse expliquer cela à toutes les franges de la population et que ces électeurs puissent se déterminer en toute connaissance de cause. Et non pas dans une fournée de questions auxquelles ils ne peuvent pas répondre parce que tout simplement la réponse à la question du référendum est une réponse directe. C’est Oui ou Non. Ce n’est pas une question qui pourrait être commentée.
SUD QUOTIDIEN