Joal demande l’exhumation et le rapatriement du corps de Senghor
Décédé en 2001 en France, la dépouille du Président Léopold Sédar Senghor est rapatriée à Dakar. A la suite des obsèques organisées par les autorités étatiques, il repose depuis lors au cimetière catholique de Bel-Air (Dakar), aux côtés de son fils, Philippe. Seulement, de son vivant, Senghor s’était fait construire trois caveaux au cimetière de Joal et avait exprimé la volonté d’y reposer avec son fils et son épouse. Une recommandation du défunt Poète-Président que Joal appelle à faire respecter.
L’inhumation du Président Léopold Sédar Senghor à Dakar, n’est pas du goût des populations de Joal. 13 ans après, le fait semble encore être resté en travers de la gorge des habitants de la terre natale de l’illustre homme de Lettres. Joal réclame aujourd’hui encore l’exhumation et le rapatriement du corps de son enfant. L’avis est partagé par Etienne Dieng, l’actuel conservateur du musé Senghor, qui dit ne pas comprendre l’attitude des autorités étatiques d’alors. «Soit, ils n’avaient pas cette information relative aux dernières recommandations de Senghor, ce qui, à mon avis est peu probable. Soit, ils ont fait fi de cette volonté, pour des raisons purement politiques. Et si c’est le cas, alors c’est grave. Car au-delà des recommandations de Senghor, ce sont aussi les aspirations et droits de toute une communauté qui sont ignorés», peste le conservateur du musée Senghor de Joal. Mais, rassure Etienne Dieng : «Je suis persuadé que les choses ne resteront pas en l’état, car de plus en plus, les habitants prennent conscience et s’organisent pacifiquement pour obtenir le rapatriement du corps de Senghor à Joal. Il y a peu de temps, la question a été soumise à l’appréciation des responsables de l’Eglise locale, à charge pour eux de poursuivre la réflexion à un niveau supérieur.»
A l’instar du conservateur du musée Senghor, un autre habitant, ancien homme de tenue aujourd’hui à la retraite et proche de la famille Senghor, embouche la même trompette. «Chaque localité a le droit de magnifier ses illustres fils, explique-t-il. Senghor a été et est une source d’inspiration pour les jeunes générations de Joal. C’est pourquoi, même mort, nous le voulons ici. J’aurais compris que dans ses dernières volontés, il décide de reposer à Dakar ou qu’il omette de dire aux gens de l’enterrer à Joal. Mais dès l’instant qu’il prend le soin de faire construire un caveau à Joal et émet le souhait d’y reposer, je pense que le meilleur hommage qu’on pouvait lui rendre était de respecter cette volonté.» Rencontrée à quelques encablures de la gare routière de la ville, la dame qui répond au nom de Bernadette Diokh, 43 ans, mareyeuse de son état, est pour la création d’un collectif de femmes engagées pour le retour de Senghor au bercail. «Il avait souhaité être enterré ici avec ses proches et tant que cela n’est pas fait, il risque de ne pas reposer en paix», soutient-elle. «Je sais que l’Eglise catholique a été saisie par les responsables de l’Eglise locale. Je sais aussi qu’il en est de même des autorités municipales et étatiques. La balle est dans le camp de l’Etat, pour qu’enfin la volonté de Senghor soit respectée», révèle une des autorités municipales de la ville, qui a souhaité garder l’anonymat, compte tenu, dit-il, du caractère sensible de la question.
GFM