Arabie Saoudite: Alacaly Cissé entre abandon et soucis de santé
«L’ancien parlementaire libéral est malade, très malade. Il n’a pas vu de médecin depuis le début de son arrestation au Maroc encore moins en Arabie saoudite. Et sa santé s’est dégradée au plus haut point. Si rien n’est fait, on va connaître une fin tragique pour cet autre citoyen sénégalais, abandonné par son pays.»
L’homme qui s’exprime ainsi est un diplomate dont le devoir de réserve l’empêche de se dévoiler. A l’en croire, pour le cas Alcaly Cissé, contrairement aux déclarations de son ministre, Mankeur Ndiaye, «rien n’est fait pour gérer ce dossier. Et cela depuis le début de l’affaire en 2012». Depuis bientôt 3 ans, abandonné par les siens et menacé de se voir appliqué la Charia, Alkaly Cissé se meurt à petit feu, rongé par la maladie et le désespoir.
Ce 24 septembre 2012, en provenance de Dakar -pour un rendez vous médical-, l’ancien parlementaire sénégalais a été interpellé dans un aéroport du Maroc, sur la base d’un mandat d’arrêt international décerné par l’Arabie saoudite, suite à une plainte déposée par un de ses citoyens contre Alcaly Cissé.
« Au delà de la personnalité du mis en cause –ancien député et porteur d’un passeport diplomatique-, c’est la souveraineté du Sénégal et l’image des décisions rendues par ses institutions qui ont été bafouées par le Maroc et piétinées par l’Arabie Saoudite».
Pour rappel, Alcaly Cissé poursuivi par Ali Azzouz qui l’accusait de lui avoir soutiré plus de 2 milliards de FCFA dans une rocambolesque affaire commerciale –il lui aurait promis de lui vendre toutes les forêts de la Casamance, du Ghana et de la Côte d’Ivoire qui seraient sa propriété- avait, en 2001, été blanchi par la justice sénégalaise.
Mais, non content de cette sentence, le saoudien a ester en justice dans son pays. «C’est ce qui est inacceptable. En droit, à en croire Me Abdoulaye Tine, le nouvel avocat du mis en cause, on ne peut pas poursuivre une même personne devant deux juridictions différentes et la juger pour les mêmes faits». Au Maroc cette anomalie avait choqué le procureur général du royaume. A en croire, notre source diplomatique, «le procureur général du Maroc avait conseillé au Sénégalais de porter plainte au niveau international; vu que le royaume avait décidé se conformer aux accords des pays membres de la ligue arabe, au détriment du droit international.»
C’est dans ce flou juridique que va, face à l’inertie de la diplomatie sénégalaise, rester l’ancien député pendant 19 mois, dans une prison marocaine avant d’être extradé en Arabie saoudite.
Dans le royaume saoudien, les choses ne vont pas s’arranger pour lui «depuis lors, témoigne Me Tine, il ne bénéficie d’aucun soin médical et sa santé est incompatible avec la détention». Outré par la non assistance à un citoyen en danger dont s’est «rendu coupable le Sénégal», Me Abdoulaye Tine du barreau de Paris a décidé de porter le combat à l’international. Pour lui, le cas Alcaly Cissé est purement et simplement de la détention arbitraire et il entend plaider sa cause devant l’Onu et rappeler le Sénégal à son devoir de «protection consulaire».
Lors de l’une de ses dernières visites dans le royaume saoudien, le président Macky Sall s’était enquis de la situation de son compatriote et avait laissé une enveloppe de 11 millions de CFA. Les 5 devaient être destinées aux émoluments de l’avocat et le reste devait revenir à Alacaly Cissé, pour entretenir son quotidien. «Mais, accuse notre diplomate, l’avocat saoudien qu’il avait pris s’était rendu une seule fois au consulat. Il aurait reçu 2 millions cinq cents milles Franc CFA et n’est plus jamais revenu».
De source proche du consulat, on nous a affirmé que «après avoir pris l’avance, l’avocat était revenu à la charge et avait demandé plus. Mais comme Alcaly Cissé ne pouvait pas payer ce qu’il demandait, il a abandonné le dossier sans lui rendre les montants encaissés».
Souffrant d’hernie discale, de tension artérielle et de cancer de la prostate, la santé de l’ancien député s’est gravement détériorée ces derniers temps; faute de soins médicaux. «Le consul qui devait lui apporter le soutien du Sénégal, déplore le diplomate, ne s’est jamais déplacé à lui, se contentant juste de lui envoyer des émissaires qui ne lui apportent que des cachets de paracétamols pour calmer ses douleurs physiques».
Pensionnaire du quartier 17 de la prison centrale de Jeddah, l’ancien député suit tout cela de sa cellule qu’il partage avec 8 détenus, et attend toujours que la justice saoudienne tranche son dossier. Sur ce plan là aussi, les choses ne sont pas faciles, le plaignant est introuvable et le procureur a renvoyé les auditions à plusieurs reprises, exigeant à chaque
fois la présence de Ali Azzouz. A défaut du plaignant, ce sont des «prétendus témoins» qui se présentent au cabinet du magistrat pour accabler le mis en cause et passent, ensuite, au consulat pour demander un arrangement financier contre le retrait de la plainte. Demande financière jamais chiffrée et à laquelle le mis en cause a toujours refusé d’accéder, arguant être innocent. «Tout porte à croire, selon notre source diplomatique, que Ali Azzouz soit mort.
En tout cas nous n’avons aucun signe de vie de lui».
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