Souleymane Sèye Ndiaye alias «Jules Pro», mannequin acteur international- Dans les coulisses de la vie de Julo
Lundi 10 Novembre 2014
Le week-end dernier, il a fait la fierté du Sénégal, en remportant le prix du meilleur second rôle, lors des derniers trophées francophones du cinéma. Souleymane Sèye Ndiaye, alias Jules Pro, mannequin professionnel a réussi à apposer son nom parmi les jeunes talents africains du septième art. Pour L’Obs, il dresse l’itinéraire de sa vie.
Le cinéma, une passion depuis l’enfance
«Mon vrai nom est Souleymane Sèye Ndiaye, mais je suis plus connu sous le pseudo de Jules ou Julo Pro. Je suis né à Kaolack où j’ai passé une partie de mon enfance, avant de venir à Dakar. Je suis mannequin professionnel et acteur de cinéma international. Mes débuts, je les ai faits dans le Rap avant de me lancer dans le théâtre. Je n’étais alors qu’un gamin à l’époque, j’étais encore à l’école primaire. Lorsqu’il y avait des manifestations comme les génies en herbe, je m’arrangeais pour présenter des sketches. J’avais créé une troupe théâtrale qui a fini par faire le tour des autres écoles. Quand je suis venu à Dakar, j’ai continué à en faire au Lycée Blaise Diagne et je l’alliais au club d’anglais. Par la suite, j’ai arrêté les études en classe de seconde. Je n’avais pas la moyenne pour aller en 1ère S et je ne voulais aller en 1ère L, j’ai donc décidé d’arrêter pour suivre une formation en mécanique générale. Je ne pouvais pas rester les bras croisés, il me fallait trouver un métier, car mon père était décédé et nous n’avions qu’un seul frère qui se chargeait de toutes les dépenses de la famille. Mais après les études, j’ai décroché un stage, mais sans plus. J’ai enchaîné les petits boulots et les petits commerces. Pour aider ma mère, j’ai été marchand ambulant, j’ai vendu des crèmes glacées. Parfois, il m’arrivait même de commander de l’huile de palme, du jus de citron et du miel, que je revendais au détail. Je n’ai jamais accepté de baisser les bras malgré les difficultés de la vie et l’avenir m’a donné raison. Pendant tout ce temps, je n’avais pas lâché le théâtre et j’avais même réussi à faire avec ma troupe le «Baobab» deux représentations. Mais, ce n’était rien de bien grandiose.»
Le mannequinat, un tremplin
«Après plusieurs années, je n’avais pas réussi à percer dans ce milieu comme je le souhaitais et c’est ainsi que j’ai mis en stand by ma passion. Toujours est-il que c’était dans un coin de ma tête, même si j’ai arrêté les sketches, j’ai continué à faire des recherches là-dessus pour mieux me performer. Je me suis rendu compte que la mode pouvait être un tremplin pour percer dans le cinéma. Je m’y suis donc investi et cela a bien tourné pour moi. Je n’aurais jamais cru faire du mannequinat un jour, car je me voyais mal défiler en tant qu’homme. Mon père de son vivant et ma sœur qui était mannequin ont essayé de me pousser là-dedans à maintes reprises, mais j’ai refusé en arguant que ce n’était pas pour moi. D’ailleurs, personne n’attendait cela de moi, j’étais toujours avec mon gros chapelet, en train de prier. Mais lorsque je me suis laissé tenter, je n’ai pas regretté. En 2005, j’ai fait ma première apparition dans le magazine «Thiof» et j’ai enchaîné les défilés avec Soufyno Moda, puis j’ai honoré les grands rendez-vous de mode au Sénégal comme la Sira Vision, Fashion-Week, entre autres. J’ai également été formateur dans une grande agence de mannequinat. De grands noms de ce milieu, comme Lissa (Mame Diarra Thiam), Baidy Kane (Baïdiche), Feuza, Chacha Kara sont passés entre mes mains. Malheureusement, on a été obligé de fermer boutique. Lors de ma dernière venue au Sénégal, je voulais la restructurer, mais, je n’ai pas pu aller au bout de ma vision pour cette agence car quand je décide de m’investir, c’est pour que cela soit pérenne. Je pense qu’il faut mettre sur pied un syndicat pour les agences de mannequinat car il y a beaucoup d’agences de mannequinat au Sénégal. Et elles fonctionnent souvent dans l’informel. J’aurais souhaité un plus grand respect pour les mannequins sénégalais.»
Moussa Touré, le promoteur
«C’est à travers les défilés que Moussa Touré, le réalisateur sénégalais m’a repéré et m’a contacté pour un casting. J’y suis allé alors qu’il était au 4e casting et je lui ai tapé dans l’œil. Mon profil collait bien à ce qu’il recherchait pour son film «La pirogue» et il m’a fait part de ses attentes. Cela m’allait bien et nous avons collaboré ensemble. Le film est sorti et a enregistré un franc succès. Il a remporté beaucoup de trophées et avait même été sélectionné au Festival de Cannes. Moussa Touré est quelqu’un de très connu dans le milieu. J’ai fait plusieurs festivals avec lui. L’année dernière à Namur (Belgique), j’ai fait partie des 5 futurs jeunes talents de la Francophonie invités pour des ateliers de cinéma. Ce fut une expérience grandiose. Après sa sortie, je suis resté 4 mois en off en Italie avec mon épouse qui venait d’accoucher. Cette période m’a fait prendre conscience de mon envie de m’établir définitivement au Sénégal. Je trouvais bien de faire carrière à l’étranger dans le cinéma, mais je trouvais encore mieux de revenir à la case départ. Histoire de montrer ma fierté d’appartenir à ce pays où tout a commencé pour moi. C’est de là qu’on m’a repéré, j’attendrai ici qu’on me fasse des propositions. Maintenant, si je dois tourner à l’étranger, si cela nécessite des mois, j’irai sans problème. Ma femme et mon fils de trois ans sont aussi revenus vivre au Sénégal. Ce n’est pas une vie évidente pour eux ici, d’autant plus que je ne suis jamais sur place avec mon métier. J’ai réussi à avoir un agent qui se charge de me trouver des castings. C’est ainsi que j’ai été contacté par un Danois pour tourner dans un film en Chine. Après mon retour de Chine, je suis revenu au Sénégal et c’est à ce moment que Diana Guèye, la réalisatrice cherchait des personnages pour son film «Des étoiles» et elle est passée par son agence pour me trouver. Nous nous sommes rencontrés et nous avons discuté, avant de tomber d’accord sur son projet. Dieu merci, le film a également très bien accueilli et j’ai remporté le prix du meilleur second rôle lors des derniers trophées francophones du Cinéma. Maintenant, le trophée en soi était une belle surprise. Je reste un débutant dans le cinéma et lorsque je m’engage dans un projet, je m’investis à 100% et n’espère rien du tout à part satisfaire le réalisateur. Gagner un trophée est un plus qui permet d’ouvrir des portes. Je pense qu’il y avait 16 films en compétition, on est descendu ensuite à 5 sélections avant que le nom du lauréat tombe. C’est une victoire pour le Sénégal. «La pirogue» a été primée au moins 30 fois à travers le monde entier. Alain Gomis avait été primé. Cela devrait pousser le Président du Sénégal à s’intéresser de plus près au cinéma sénégalais. Il y a beaucoup de projet de films au Sénégal et les jeunes sont pleins de talent. Il faudrait leur donner plus de visibilité. J’ai également un autre court métrage à mon actif, je l’ai fait avec une Américaine pour son mémoire. Ensuite, un autre réalisateur franco-sénégalais m’a sollicité pour jouer un rôle dans un film sur les tirailleurs sénégalais en collaboration avec France 3. Actuellement, je suis dans ce projet, c’est la raison qui m’a poussé à prolonger mon séjour en Europe.»
Les clips-vidéos, toujours un jeu de rôle
«J’ai quelques apparitions dans des clips-vidéos. C’est le groupe «Gelongal» qui est d’abord venu vers moi pour le clip «Diaga» de Thione Seck. Ils m’ont expliqué le rôle et je me suis retrouvé dedans. C’est comme cela que tout est parti. Je ne l’ai pas fait pour de l’argent ou pour autre chose, car moi j’œuvre avant tout à faire des choses qui peuvent vendre mon image et la soigner. C’était le cas aussi pour le clip de Viviane «Reetane» et elle fait partie des ténors de la musique. Au début, je ne voulais pas y danser, mais je me suis tellement mis dans la peau du personnage que je n’ai pas pu me retenir d’esquisser des pas de danse (rires). C’était en quelque sorte comme dans un des films que je joue. Pendant ce temps, je continuais à défiler. J’ai défilé dans plusieurs villes comme à New York où j’ai effectué des shootings avec quelques agences car je voulais perfectionner mon anglais. Je voulais y rester pendant 6 mois, mais comme je devais intégrer un tournage où je devais être un mois à l’avance, je n’y suis resté que pendant deux mois. En Europe, j’évolue plus dans le cinéma, mais cela n’empêche que je reste dans le monde du mannequinat. L’avantage d’allier les deux est que mon cachet de mannequin évolue selon ma notoriété dans le cinéma. J’arrive à m’en sortir, à assurer le minimum.»
GFM
Abdoul Aziz Diop
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