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Retour sur cette affaire en cinq questions :
- De quoi l’UMP est-elle accusée ? -
- Qu’est-ce que Bygmalion ?
- Qui est impliqué ?
- Nicolas Sarkozy pouvait-il ne pas savoir ?
- Qui risque quoi ?
1. De quoi l’UMP est-elle
accusée ?
L’UMP est accusée d’avoir organisé un système de fausses factures pour que les dépenses de campagne de Nicolas Sarkozy pour l’élection présidentielle de 2012 restent inférieures au plafond autorisé par la loi.
En clair : une partie des frais occasionnés par la campagne de M. Sarkozy n’était pas réglée par son association de financement, l’Association pour le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy, comme cela aurait dû être le cas. Bygmalion, l’entreprise prestataire de la campagne, les facturait en réalité à l’UMP, au prétexte d’événements plus ou moins fictifs. Le principe permettait à la campagne de M. Sarkozy de ne pas dépasser le montant de dépenses autorisées, tout en bénéficiant de prestations (l’organisation de meetings notamment) indûment facturées au parti.
Officiellement, au lieu des meetings de campagne, ce sont donc des conventions thématiques organisées pour l’UMP qui ont été facturées. Les révélations successives dans la presse ont montré que ces dernières présentaient un coût largement exagéré. Parfois même elles étaient fictives, certains de leurs participants – des élus de l’UMP – n’en ayant aucun souvenir, comme le racontait Libération en révélant l’affaire.
Ce présumé montage financier n’a pas empêché la défaite de M. Sarkozy. En outre, le Conseil constitutionnel, confirmant une décision de la Commission nationale des comptes de campagne et du financement de la vie politique, avait invalidé en juillet 2013 les comptes du candidat de l’UMP, constant un dépassement des plafonds de dépenses autorisés – ce qui avait annulé le remboursement des frais de campagne.
Mais les « sages » semblent avoir été loin du montant réel des dépassements : selon Jérôme Lavrilleux, l’UMP aurait, « en plus des fausses factures de Bygmalion », dépensé 10 millions d’euros au lieu des 2,5 millions prévus dans le budget du parti. Une somme qui porterait donc les frais de la campagne à un total de 50 millions d’euros, bien au-delà du plafond légal de 22,509 millions d’euros.
D’après lui, ces 10 millions auraient servi « à financer des affiches, à payer les transports des militants... »
2. Qu’est-ce que Bygmalion ?
C’est une filiale de Bygmalion, Event & Cie, aujourd’hui en liquidation, comme sa maison-mère, qui a organisé les meetings du candidat Sarkozy en 2012 ainsi que plusieurs conventions pour l’UMP.
La société Bygmalion SAS a été dirigée de 2009 à 2013 par Bastien Millot, très proche de Jean-François Copé dont il a été le chef de cabinet à la mairie de Meaux. Il se serait désormais éloigné de l’entreprise.
Selon le dernier bilan disponible sur societe.com, le PDG est Guy Alvès, chef de cabinet de M. Copé quand ce dernier était ministre du budget (2005-2007), via la société AMM Participations, et le directeur général Richard Gibeaud, via la société RG Management. Les deux ont pris le soin d’être présents en tant que personne morale et non physique, ce qui permet d’acquérir des biens meublés distincts de son patrimoine personnel (et donc protégés en tant que tels).
D’ailleurs, la société dispose de quatre adresses : une principale à Paris et trois en province (une villa près de Toulon, une ferme dans le Perche et un manoir dans l’Aisne).
3. Qui est impliqué ?
Les investigations, menées par trois juges parisiens – Serge Tournaire, Roger Le Loire et Renaud Van Ruymbeke – ont abouti à treize mises en examen. Parmi elles, outre M. Millot, trois anciens cadres de Bygmalion, Guy Alvès, Franck Attal et Sébastien Borivent. Ces derniers reconnaissent avoir eu connaissance de la fraude.
Dans un premier temps, les magistrats avaient mis en examen les cadres de la société de communication Bygmalion et de sa filiale Event & Cie, ils sont depuis passés à l’échelon politique. Sont désormais poursuivis, outre M. Lavrilleux, l’ex-directeur général de l’UMP Eric Cesari, ou encore Guillaume Lambert, ancien directeur de la campagne de M. Sarkozy.
Jérôme Lavrilleux
C’est lui qui a imposé Bygmalion à l’UMP pour assurer la communication et, surtout, qui aurait proposé le système frauduleux, selon le directeur adjoint d’Event & Cie, Franck Attal. En mai 2014, au bord des larmes à la télévision, il avait le premier reconnu des « dérapages » financiers pendant la campagne.
Eric Cesari
Selon Jérôme Lavrilleux, c’est lui qui aurait organisé le système. Nommé directeur général de l’UMP en 2008 après le départ de Nicolas Sarkozy pour l’Elysée, ce très proche de l’ancien chef de l’Etat était surnommé « l’œil de Moscou » ou, sans ambiguïté, « l’œil de Sarkozy ».
Fabienne Liadzé
A la fois directrice financière de l’UMP et responsable du pôle finances de la campagne de 2012, elle est accusée par Jérôme Lavrilleux et Bygmalion d’avoir participé à la fraude comme « exécutante ».
Guillaume Lambert
C’était le directeur de la campagne de Nicolas Sarkozy. Il était la « courroie de transmission » entre la réunion stratégique quotidienne de la campagne et l’UMP.
Bastien Millot
Sans nier l’existence des fausses factures, il a affirmé que Jérôme Lavrilleux n’avait « pas monté tout cela tout seul » et qu’il n’avait été « qu’un rouage dans une organisation plus large », sous-entendant que M. Copé aurait pu avoir été mis au courant par M. Lavrilleux de l’affaire.
Franck Attal
Patron de la filiale événementielle de Bygmalion, il a témoigné des pressions et des demandes de l’équipe de campagne, notamment pendant la fameuse réunion avec Fabienne Liadzé et Eric Césari, pointant la responsabilité de Jérôme Lavrilleux : « J’ai l’impression que tous les participants à cette réunion sont piégés. »
Guy Alves
Autre cofondateur de Bygmalion, il justifie d’avoir accepté les fraudes pour pouvoir payer ses sous-traitants : « Je suis face à une demande de franchissement de la ligne jaune, c’est-à-dire accepter des fausses écritures ».
4. Nicolas Sarkozy pouvait-il ne pas savoir ?
Le président-candidat avait toutes les chances de connaître l’existence de ces fausses factures. Plusieurs éléments vont dans ce sens :
- Une note de Pierre Godet, l’expert-comptable qui signait les comptes de campagne, adressée à Nicolas Sarkozy, le 26 avril 2012, soit cinq jours après le premier tour. Cette note mentionne que les dépenses prévisionnelles ou engagées pour le premier tour (18 399 000 euros) sont déjà supérieures au plafond autorisé (16 851 000 euros).
- Un entretien entre le président-candidat et Jean-François Copé, alors patron de l’UMP. En témoigne un SMS de Guillaume Lambert à Jérôme Lavrilleux, déjà évoqué par Le Figaro, dans lequel le premier explique au second : « Nous n’avons plus d’argent. JFC en a parlé au PR [président de la République] ».
5. Qui risque quoi ?
Le parti d’opposition est pour le moins dans l’embarras. Le dépassement en question dans l’affaire Bygmalion peut entraîner, s’il est confirmé, une amende équivalente à ce dépassement.
Mais ce n’est pas tout : l’enquête des juges, initialement ouverte pour faux, usage de faux, abus de confiance, tentative d’escroquerie et complicité et recel de ces délits, a été étendue depuis un an au délit de financement illégal de campagne électorale.
Ce dernier est puni de 10 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende. Le faux et l’usage de faux sont punis de trois ans d’emprisonnement et jusqu’à 45 000 euros d’amende par les tribunaux correctionnels. L’abus de confiance est passible de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende. La tentative d’escroquerie est passible de 5 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende (1,8 million pour les personnes morales).
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