Portrait de Jeune Afrique: Ousmane SONKO, l'accusateur du clan Macky SALL
Lundi 19 FĂ©vrier 2018
L’ex-inspecteur des impôts a trouvé son credo : la critique radicale du pouvoir - Et tant pis s’il se fait de puissants ennemis en chemin
Une fois de plus, il n’a pas lésiné sur la formule. À l’occasion de la visite d’Emmanuel Macron au Sénégal, début février, Ousmane Sonko a estimé que Macky Sall ferait un « bon préfet de “nos ancêtres les Gaulois” ». Une phrase choc, lancée sans retenue contre sa cible préférée. Comme à chaque fois, ceux qui apprécient la fougue du jeune trublion ont applaudi. Les autres se sont indignés, ne voyant en lui qu’un populiste irrévérencieux.
Encore inconnu il y a deux ans, l’ancien inspecteur des impôts devenu leader des Patriotes du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef-Les Patriotes) est aujourd’hui la coqueluche des médias locaux. Élu pour la première fois aux législatives de juillet 2017, en présentant sa propre liste, ce grand échalas de 43 ans ne passe pas inaperçu. Depuis son entrée à l’Assemblée, il attaque à tout-va. Sur le traitement de faveur dont bénéficieraient les députés, sur le coût du futur train express régional (TER), sur les Accords de partenariat économique (APE)…
Lutte contre la corruption
Ses thèmes de prédilection ? La lutte contre la corruption et la mauvaise gouvernance, sujets sensibles sur lesquels Macky Sall et ses lieutenants se voulaient irréprochables lors de leur arrivée au pouvoir, en 2012. « C’est un agitateur démagogue qui fait son show sans jamais étayer ses accusations avec des éléments concrets, critique Aymerou Gningue, le chef de la majorité parlementaire Benno Bokk Yakaar. Il ne fait peur à personne avec ses enfantillages. Tout le monde finira par comprendre qu’il n’est pas sérieux. »
Après avoir dénoncé plusieurs sipposées « anomalies » fiscales ou budgétaires dans le fonctionnement de l’État et mis directement en cause le président et son entourage, Sonko a été radié de l’Inspection générale des impôts et domaines en août 2016 pour « manquement au devoir de réserve ». Le natif de Thiès est depuis devenu un opposant virulent à Macky Sall. Il dénonce notamment l’opacité des conditions d’attribution des contrats d’exploitation du gaz et du pétrole récemment découverts au Sénégal. Dans son viseur : Aliou Sall, le frère cadet du chef de l’État, un temps gérant de la filiale locale de la société Pétro-Tim, à laquelle ont été accordées des licences d’exploration.
Le clan Sall et le code pétrolier
Le 31 janvier, Sonko a présenté son livre Pétrole et gaz au Sénégal. Chronique d’une spoliation, dans lequel il accuse le clan Sall d’avoir « violé » le code pétrolier et la Constitution. Nouveau tollé dans les rangs de la majorité. « Qu’ils répondent à mes accusations sur le fond plutôt que d’user d’arguments politiciens, se défend Sonko. Ils refusent de débattre, et je ne suis poursuivi devant aucun tribunal. Je laisse les Sénégalais en tirer leurs propres conclusions. »
Parmi ses soutiens, Thierno Alassane Sall, ex-ministre de l’Énergie congédié en mai 2017 après avoir refusé de signer un contrat avec Total, et Abdoul Mbaye, ex-Premier ministre devenu opposant, lui aussi en première ligne dans les affaires pétrolières et gazières. « Sonko refuse toute compromission. Il faudra sûrement compter avec lui dans les années à venir », croit savoir Mbaye. L’intéressé ne semble d’ailleurs pas dénué d’ambitions : certains le voient même se présenter à la présidentielle de 2019. Interrogé sur ses objectifs, Sonko se contente de répondre qu’il n’est « pas là pour faire de la figuration ».
Abdoul Aziz Diop
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