Plus de 16% de déclarations d'opérations suspectes reçues par la CENTIF: Sénégal, terre de blanchiment d’argent
Le groupement intergouvernemental d’actions contre le blanchiment d’argent en Afrique de l’ouest a invité, depuis hier, les pays de la sous- région à un atelier de travail, afin de mettre en place des législations efficaces, dans le cadre du recouvrement des avoirs.
En matière de poursuites des crimes économiques et financiers, le Sénégal semble tirer son épingle du jeu sur la scène internationale. Des statistiques avancées par Waly Ndour, président de la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif), semblent confirmer cette impression, même si elles confirment, par ailleurs, que le Sénégal est également une terre propice aux actes de blanchiment d’argent. Selon, Waly Ndour, le nombre de rapports transmis aux parquets rapportés à celui de déclarations d’opérations suspectes reçues par la Centif est de plus de 16%, alors que la moyenne internationale tourne autour de 3%.
S’exprimant à l’ouverture d’un atelier régional sur les poursuites des crimes économiques et financiers et le recouvrement des avoirs organisé par le Giaba, M. Ndour a soutenu que la Centif a reçu à ce jour 668 déclarations d’opérations suspectes desquelles 11 rapports ont été transmis au procureur de la république. ‘’Sur la base de ces rapports, la justice sénégalaise a déjà rendu 22 décisions dont 12 condamnations, à des peines de 2 à 5 ans d‘emprisonnement, assorties de sanctions pécuniaires, le tout portant sur plus de 10 milliards de francs Cfa’’, a indiqué le président de la Centif.
10 milliards non recouvrés
Malheureusement, c’est à ce niveau qu’un dysfonctionnement s’opère au niveau du système, car ces montants ne sont jusqu’ici pas recouvrés. Même s’il soutient que ces statistiques montrent l’efficacité du dispositif mis en place par le Sénégal, en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, il n’a pas manqué de dénoncer les lacunes qui dérèglent le système. Wally Ndour a soulevé l’absence d’une législation adéquate, relative aux modalités de recouvrement des avoirs gelés, confisqués ou saisis et leur mode de gestion, mais également la non implication de l’agence judiciaire de l’État (Aje), dans les procédures pour défendre les intérêts du trésor public.
Deux des nombreuses imperfections du système qui ont motivé la tenue de cet atelier démarré hier et qui prend fin ce vendredi. A cet atelier, plusieurs pays de la sous-région ont été invités, avec le Nigeria qui mettra au profit des autres États son expérience puisqu’étant le pays ayant une des législations les plus performantes en matière de lutte contre le blanchiment d’argent.
Certains États rechignent à lutter contre la criminalité transnationale organisée
Les conclusions issues des travaux permettront de dégager les voies et moyens de rendre plus efficace la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme au Sénégal et dans tous les autres pays membres de la Cedeao. Un intérêt partagé par Dr Abdullahi Shehu, directeur général du Giaba qui a souligné que le recouvrement d’avoirs est devenu le centre d’intérêt de la lutte contre le crime transnational. ‘’Malheureusement, a-t-il soutenu, les efforts de recouvrement d’avoirs n’ont pas encore atteint un niveau appréciable en Afrique de l’Ouest.
Le nombre de condamnations pour blanchiment de capitaux, dans la région reste négligeable. L’évaluation mutuelle des États membres du Giaba montre que les États membres de notre région ont encore beaucoup d’efforts à faire, en ce qui concerne les recommandations du Gafi relatives au recouvrement d’actifs et celles relatives à l’effectivité de poursuites judiciaires des cas de blanchiment de capitaux. Comme si cela ne suffisait pas, certains de nos États membres n’ont pas encore signé, ratifié, ou adhéré aux conventions internationales pertinentes visant à lutter contre la criminalité transnationale organisée’’.
Tous les aspects du recouvrement des actifs seront examinés au cours de cet atelier auquel des juges de haute cour de justice, des fonctionnaires d’institutions et des agences compétentes ont été conviés.
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