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Personne n’échappe au magnétisme. Les pires bourreaux comme les tout-puissants, les badauds comme les sympathisants. Tous ont, un jour, vibré à la musique du «Roi». Et tous ont apprécié cette belle... voix du succès. «Youssou Ndour, c’est un très très grand artiste», disait Charles Konan Banny, l’ex-gouverneur de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao) devenu plus tard le huitième Premier ministre de la Côte d’Ivoire sous Gbagbo Laurent. Ce soir-là, le «big boss», comme on l’appelle affectueusement dans les cercles fermés des institutions financières africaines, sortait d’une soirée de gala animée par l’enfant de la Médina. Gavé de décibels, l’inconditionnel de Emigré au physique de grand manitou, n’avait plus que des superlatifs à la bouche. «Youssou, c’est l’un des meilleurs ou le meilleur», ajoutait-il, avec une (fausse) retenue exigée des «Grands Messieurs» de sa trempe.
Et le samedi 04 janvier dernier au Grand Théâtre de Dakar, ce n’était plus une, mais des milliers de personnes à adopter la même voix. A scander le nom de l’artiste africain du siècle dernier. A chanter, danser et prendre du plaisir avec le «Roi du Mbalax». A lui lancer, à chaque pause musicale, qu’il est le «meilleur», le «géant», l’«oncle» ou le «papa» de tous les musiciens. «Dou niit(c’est un surhomme !)», criaient même les plus blasés de cette foule d’inconditionnels du Super Etoile.
«Il ne badine pas avec le boulot»
Lors de cette dernière étape du premier tour d’une tournée nationale placée sous le signe de la promotion de la destination Sénégal, You n’avait pas seulement, après avoir communié avec ses fans de Saint-Louis, Mbour, Fatick, Kaolack, retrouvé son public dakarois. L’enfant de la Médina, dont les pourfendeurs doutaient de sa capacité à retrouver son niveau après des années politiques marquées par un passage au gouvernement de «Macky1», a démontré qu’il est et reste le seul vrai écrivain des lettres de noblesse du «Mbaalax». Le plus époustouflant, c'est que l’âge ne semble pas avoir d’effet sur l'auteur de Birima.
Malgré les tubes planétaires empilés à la vitesse d'une musicalité millimétrée, les albums aboutis, les prix à la pelle, les rencontres jalousées, l'emploi du temps de «roi» et sa stature internationale, le lead vocal du Super Etoile n'a jamais semblé être habité par la lassitude. Jamais en proie à l’abandon. «Je vous avais dit que Youssou Ndour allait chanter de nouveau... Je vous l’avais dit», a rappelé l’indécrottable Mbaye Dièye Faye, l’éternel jumeau de You. Comme pour répondre à cette accusation drue sur la place publique : Youssou Ndour, le stakhanoviste d'hier, bosseur à la soif inextinguible de reconnaissance, est devenu aujourd'hui un simple politicien qui hante les cercles du pouvoir au lieu de chercher à repousser ses limites.Mara Dieng, homme de confiance et chef de cabinet de Youssou Ndour : «Tout le monde sait que cette accusation est fausse. Si Youssou s’est engagé en politique, c’est parce qu’à un moment donné, le peuple souffrait. Et comme il a toujours été du côté du peuple, il a plongé. Youssou, c’est un porteur de voix, un grand Sénégalais, qui n’est intéressé que par le bien-être du peuple. Comme il le dit souvent, il a de quoi vivre jusqu’à la fin de sa vie. Donc, s’il s’engage en politique, c’est juste pour aider à améliorer le quotidien des Sénégalais. Ce qu’il faut aussi retenir, c’est que Youssou est avant tout un artiste. Il n’abandonnera jamais ce qui l’a fait connaître au monde entier.»
SUCCESS. Porté par sa voix polychrome, l’enfant de la Médina a consacré toute sa vie à tisser la toile majuscule d'une carrière à la musique phénoménale. D’une musique aux goûts étincelants qui lui a octroyé une existence passée à gravir une à une les marches de la gloire. Lui ne s’est jamais permis un seul signe de faiblesse. «Toute sa vie n’est que travail, témoigne Kamou Seck, chef de protocole du Super Etoile. Il ne badine jamais avec le boulot. Lors des répétitions, il est le plus souvent le premier à arriver et le dernier à quitter. Il peut rester souvent des heures et des heures à répéter, avec le groupe, un morceau. Tant qu’il n’a pas le résultat escompté, il ne s’arrête jamais.»
A force de travail, son aura a dépassé l'entendement. Son Etoile est aujourd'hui un label. Surtout, Youssou Ndour n'a jamais oublié d'où il vient. Depuis l'âge de 13 ans, le gamin de la Médina, devenu milliardaire faiseur de hits, se dépense à esquiver la réserve paternelle. Cette gifle de son papa, Elimane, qui avait pour ferme ambition de refréner son envie d'embrasser une carrière de musicien, au milieu des années 70. Griot à moitié (du côté de sa maman, Ndèye Sokhna Mboup), l'auteur de «Seven Seconds» s'était fait violence pour oublier son sang royal (du côté de son père) et enclencher son escapade vers cette gloire exclusive. Vers ce destin cousu d'or. «Le griot, à l'époque, ne se faisait respecter que lorsqu'il chantait dans les mariages, les baptêmes, confiait-il aux confrères du journal français Libération à la veille de Bercy 2008. Sinon, il n'attirait pas l'attention dans la vie de chaque jour.» Lui a attiré l'attention sur lui en faisant tout le contraire : chanter sur les plus prestigieux plateaux du monde, épater la galerie sur les plus grandes scènes du monde, partager le micro avec le haut du panier du showbiz mondial. Aujourd’hui, Youssou Ndour n'est plus le «Roi du Mbalax», c'est un roi tout court, une tête de gondole du showbiz international, qui s'assoit aux tables les plus gratinées du monde. Sa chaleureuse poignée de main avec le Président américain, Barack Obama, en visite au Sénégal, à l’aéroport Léopold Sedar Senghor, en est une belle preuve. L’homme le plus influent du monde avouera même plus tard, en l’honneur de You, que sa femme et lui ont des chansons du patron du Super Etoile dans leur playlist.
«Il est prêt à tout pour aider son peuple»
Fiéffé ambitieux, le jeune Youssou Ndour a claqué la porte du «Kassé Star» pour former avec sa bande de potes, l'Etoile de Dakar. A cette époque, le jeune chanteur a déjà l'étoffe d'un lead vocal qui se cherche un cadre approprié pour son envol. Et c’est à partir de ce moment que commence son vrai pari pour une montée glorieuse vers les cimes de la musique mondiale. Naîtra plus tard le professionnel Youssou Ndour, un talent brut de décoffrage couvé par un orchestre, le Super Etoile, au talent complémentaire. La musique sénégalaise doit à ce fameux groupe de l'avoir décomplexé et d'avoir franchi les ultimes paliers sur une world music jusque-là fermée au «Mbalax», longtemps indéchiffrable pour les oreilles allochtones. «C'est la plus belle voix du monde», avait dit son découvreur, Peter Gabriel, le chanteur britannique, qui l'a lancé dans le circuit mondial. «Il était venu me voir alors que je passais pour la première fois à Londres. Je ne connaissais même pas sa musique. Il m'a invité à venir chez lui où il préparait son album So. Nous avons passé deux jours extraordinaires à chanter», se remémore You. Depuis, micro en main, l’enfant de la Médina a tout connu. Tout chanté de sa voix singulière, qui résonne jusque dans les endroits les plus sélects, jusque dans les rendez-vous des «Grands du monde».
STORY. Lui, le petit garnement analphabète de la Médina, qui s'est mis au français suite à une recommandation du défunt animateur de Rfi, Gilles Obringer, afin de pouvoir s'épanouir au plan international, est aujourd'hui, avec son mouvement «Fékkéé Maci Boolé» (majorité présidentielle) un politique affirmé, ambassadeur de bonne volonté du continent noir, un défenseur dévoué d'un certain afro-optimisme qui revendique sa place au concert des nations. «L'Afrique a eu ses idées, ses inventions, ses visions, il faut les faire ressurgir, soulignait-il au sortir du sommet du G8 où il était le seul Africain à être invité. Nous avons beaucoup reçu de la part des pays développés, mais nous nous souvenons que nous avons aussi beaucoup apporté.» Lui pour sa part, a déjà beaucoup fait pour son pays : une tournée pour l'Education nationale et une campagne pour le consommer local dans les années 90, une campagne contre le paludisme (Roll Back Malaria) etc. «Il est prêt à tout pour aider son peuple, témoigne Saint-Louis Mané, ami et homonyme d'un des fils de la star. Il parle très souvent du Sénégal à l'étranger. C'est quelqu'un qui aime son pays.»
La preuve : il n'a jamais déplacé son QG hors du pays, contrairement à beaucoup de ses pairs africains qui ont eu à jouir d'une reconnaissance internationale. Un de ses amis : «Youssou ne pourra jamais s'épanouir ailleurs qu'au Sénégal.» L’expression est galvaudée, mais il est juste de dire que c'est un Sénégalais dans l'âme. Son aura, sa carrière et sa fortune lui permettent de vivre où il veut dans ce monde, mais je crois que, hors du Sénégal Youssou serait un homme malheureux. Il adore vivre à la sénégalaise.»
A Dakar, «sa base», Youssou Ndour a sa famille, ses amis, ses repères, mais aussi son business. En homme averti, il est devenu, avec le temps, un musicien au souffle long et au flair de businessman. Un entrepreneur hors-pair. En plus de sa voix pour la musique et quelques affaires dans le bâtiment, la star a surtout tracé sa voie dans la communication. Il a mis sur pied une grande maison de presse : le Groupe futurs médias, qui compte une radio, Radio futur medias (RFM), une imprimerie, un quotidien, L'Observateur, qui a le premier tirage du pays (100 000 exemplaires), une Télévision, la TFM, miroir du Sénégal et un site d’informations, (iGFM). «Si les gens ne sont pas informés, ils ne peuvent pas décider par eux-mêmes, expliquait-il dans Libération. C'est comme ça que l'on voit encore dans des pays d'Afrique, des gens dont on peut acheter les votes. C'est terrible ! Souvenez-vous aussi du rôle des médias [comme la radio des mille collines, Ndlr} dans les massacres du Rwanda.»Mamoudou Ibra Kane, Administrateur général du groupe Futurs médias : «Pour qui connaît Youssou Ndour, c’est un homme qui bouillonne d’idées. C’est quelqu’un qui donne l’impression de ne vouloir jamais s’arrêter. C’est quand même assez paradoxal pour un artiste de sa dimension - les grands artistes marchent souvent à l’intuition - mais lui, il prend toujours le temps de bien mûrir ses idées. Il a beaucoup de projets pour le groupe Futurs médias. Car pour lui, la presse doit être une véritable activité économique comme toutes les autres. On ne peut pas tout révéler, mais je peux dire que Youssou Ndour à l’ambition de développer encore le groupe. Il projette de faire de Futurs médias une véritable industrie.»
«Le football, sa seule vraie passion»
PLAYER. Seule star planétaire de la musique sénégalaise (dixit Souleymane Faye), Youssou Ndour n'a pas que du rythme dans le sang. A côté du chant, le football est la seule vraie passion de sa vie. C'est le ballon rond qui le fait chavirer, non le micro. «Il aime le foot plus que tout au monde», témoigne Khalifa Sylla, son pote d’enfance. Môme, dans les dédales infestés de la Médina, le petit You passait ses journées à taper dans le cuir. Il était le genre à s'abîmer dans le sable, à prendre le public à partie, quand il ne chahute pas avec Saint-Louis ou ses autres camarades, qu'il fréquente encore. «Il quittait chaque jour la rue 15 pour venir jouer au football à la rue 17. Si on ne le voyait pas, c'est qu'il était malade ou en voyage, raconte Khalifa. C'était un avant-centre, amoureux de la talonnade, mais il faut dire qu'il ratait souvent son geste.»
Plus tard, le jeune musicien, féru des matches du dimanche, se fera appeler «JPP», du nom de Jean-Pierre Papin, l'ancien avant-centre de l'Olympique de Marseille des années Tapie. A 50 ans passés aujourd'hui, le Grammy Award du meilleur album world music pour l'album Egypt (2005), n'a rien à envier aux stars planétaires du ballon rond. Il a en commun avec eux ce pouvoir de faire se lever les foules. Comme il y a quelques jours à Saint-Louis, Mbour, Fatick, Kaolack, Dakar et bientôt, avec le reste du Sénégal. Son pays de corps et de cœur
GFM.SN