PIKINE – ENVOUTEE PAR UN CHARLATAN: Elle remet à un charlatan dix millions, pompés du compte bancaire de son père
L’affaire est rocambolesque. Depuis quelques jours, elle occupe l’essentiel des discussions à Pikine-Icotaf où habite Maïmouna Bamba, 23 ans, qui sous le coup de l’envoûtement, a remis dix millions de francs à un charlatan, sans compter les bijoux de valeur et un scooter Beverly 250 qu’elle a vendu pour satisfaire les besoins en argent de son «marabout». Dénoncés à la police de Pikine, le charlatan et son complice ont été arrêtés et déférés au parquet pour escroquerie.
Le visage décomposé par la colère, Maïmouna Bamba ne tient pas en place lorsqu’elle fait face à l’enquêteur au commissariat de police de Pikine. Tellement elle en veut à Moustapha Tall, du nom de ce charlatan qui l’a entraînée dans cette histoire rocambolesque. Sa famille quant à elle, est à la fois en colère contre le charlatan, mais également contre elle, Maïmouna Bamba. Une fille qui croque la vie à pleines dents. Elle roule en scooter Beverly 250, porte des bijoux de valeur et des fringues qui en feraient pâlir d’envie plus d’un. C’est cette fille qui, un soir du mois de janvier 2015, frappe à la porte d’un charlatan du nom de Moustapha Tall qui, lui avait été recommandée par une amie pour une séance de voyance. A la vue de la jeune fille, le charlatan en extase comprend vite qu’il peut tirer d’elle beaucoup plus que les broutilles que lui rapporte généralement une séance de voyance. Sa stratégie : la rendre dépendante et lui enlever toute capacité de discernement. Pour cela, des bains mystiques sont prescrits à la fille et des talismans qu’elle doit porter sur des parties de son corps lui sont remis. Une stratégie qui marche à merveille pour le charlatan. «Après les bains mystiques qu’il m’a prescrits et une fois les talismans portés, j’étais devenue son esclave», reconnaît la jeune fille devant les enquêteurs de la police de Pikine. Hélas, la suite va devenir bizarre pour Maïmouna Bamba, devenue une vache à lait pour le charlatan. «Il me demandait des sommes d’argent et à chaque fois, je pompais dans le compte de mon père dont j’avais toute la confiance», confesse Maïmouna Bamba. Au total, dix millions Cfa ont été pompés du compte et remis au charlatan, sans que le pater de la fille ne s’en rende compte. Et quand la fille ne détenait plus de liquidité par devers elle, le charlatan lui suggère de vendre d’abord son scooter Beverly 250 et de lui remettre l’argent. Sans broncher, Maïmouna Bamba s’exécute : «J’ai cédé le scooter à 250.000 francs et je lui ai remis l’argent», raconte la fille aux enquêteurs, stupéfaits. Suivront ensuite les bijoux de la jeune fille. Maïmouna va tout brader, ainsi que les parures de sa cousine, pour encore et toujours satisfaire les besoins en argent du charlatan Moustapha Tall et de son chambellan, Babacar Ndiaye
Comment elle a découvert qu’elle était envoûtée ? Un jour, alors qu’elle se trouvait au domicile du charlatan et qu’elle pestait un peu contre les sommes d’argent qu’elle ne cesse de remettre à Moustapha Tall, un ami de ce dernier, qui a eu pitié d’elle, lui souffle à l’oreille qu’elle n’a plus la maîtrise de ses actes. Survient alors le déclic. «Quand son ami Moussa m’a dit que j’étais envoûtée par Moustapha Tall, j’ai repris mes esprits et je m’en suis ouverte à mes parents», révèle-t-elle.
Saisie d’une plainte, la police de Pikine ouvre alors une enquête, qui s’est soldée par l’arrestation du charlatan, qui a partiellement reconnu les faits, en niant toutefois le montant de plus de dix millions Cfa que la fille dit lui avoir remis. «Je lui ai fait prendre certes des bains mystiques et confectionné des talismans, mais c’était à sa demande, pour empêcher que l’argent qu’elle a volé à son père ne soit évoqué par sa famille. C’est elle-même qui allait acheter des chèvres pour les sacrifices», s’est défendu le charlatan Moustapha Tall. Et de déclarer devant les enquêteurs : «Je suis prêt à rembourser jusqu’à un million Cfa, si on m’accorde un moratoire.» Un aveu qui a précipité sa conduite au parquet le vendredi 29 août 2015, en compagnie de son chambellan Babacar Ndiaye, dont le rôle consistait à «conditionner auprès cordonniers» les talismans et autres gris-gris confectionnés par le charlatan pour la jeune Maïmouna Bamba.
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