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Moïse Ambroise Gomis, ancien président du comité Miss Sénégal: «Je quitte la mare aux crocodiles…»


Jeudi 14 Janvier 2016

Pour avoir fait les beaux jours de la mode au Sénégal, son nom est, en grandes lettres, inscrit dans les annales de la Culture au Sénégal. Moïse Ambroise Gomis est ce «faiseur de reines», à qui les plus grands mannequins sénégalais doivent leur ascension. Aujourd’hui, même si la «machine» s’est fripée, il garde toujours cette passion effrénée de gravir les cimes du monde glamour. Mais, c’est sans compter avec le poids de l’âge et un manque effectif de soutien de la part des autorités. Ainsi, l’ancien amiral de Miss Sénégal a décidé de quitter «la mare aux crocodiles», sans pour autant larguer les amarres. C’est dire qu’il plonge dans un avenir plus radieux. Du soleil dans les yeux, il se projette déjà dans les prochains Ciseaux d’or qui se tiendront le 12 février prochain. En attendant, pour L’Obs, il revient sur les circonstances de sa défection…


Moïse Ambroise Gomis, ancien président du comité Miss Sénégal: «Je quitte la mare aux crocodiles…»

Amina Badiane, une ancienne mannequin vient de reprendre à votre suite, l’organisation du concours de beauté Miss Sénégal, quels sont les termes de votre accord ?

Effectivement, je ne suis plus dans le comité d’organisation de l’élection Miss Sénégal. Amina Badiane est désormais la présidente et je serai son conseiller. A chaque fois qu’elle le voudra, je vais l’accompagner. Jusqu’ici, notre collaboration se passe très bien.

Comment le contact s’est établi entre vous ?

Nous avons un ami en commun qui est de Thiès d’où Amina Badiane tient ses origines. Ce dernier qui me connaît mieux que quiconque, sait à quel point, je suis passionné par la mode, notamment par le concours Miss Sénégal. Au détour d’une discussion, il m’a dit qu’il serait dommage que je quitte la scène sans transmettre le flambeau. Je lui ai alors rétorqué que je ne connaissais personne du milieu qui était dans les dispositions financières et surtout l’envie de prendre ma suite. C’est comme ça qu’il m’a parlé d’Amina Badiane qui, semblait-il, avait l’étoffe pour. A ce moment, elle n’était pas encore revenue au Sénégal. De fil en aiguille, nous en sommes venus à nous rencontrer. Dans ses propos, j’ai ressenti un réel engouement de sa part et compris, à ce moment-là, qu’elle avait 99% de chance de me succéder. J’ai trouvé en elle, la personne du milieu de la mode qu’il me fallait et le reste s’est fait naturellement. J’estime que les moyens seuls ne suffisent pas. On a beau avoir les moyens, si la passion ne suit pas, on risque de se brûler les ailes.

Vous n’êtes plus au cœur de Miss Sénégal, mais vous restez dans les coulisses. Est-ce à dire que vous avez toujours du cœur à l’ouvrage ?

Bien entendu ! Je poursuis d’ailleurs mon aventure dans la mode. J’ai encore d’autres surprises dans ma hotte, pour le plus grand plaisir des férus de mode. Je collabore toujours avec une télévision de la place et j’ai de projets à soumettre à ses dirigeants. Dès que ce sera validé, le public pourra voir ses réalisations devant son téléviseur.

Pouvez-nous en dire un peu plus sur ces projets à venir ?

Dans un premier temps, nous allons terminer les précédentes éditions des Ciseaux d’or. Faute de moyens, nous nous étions limités aux phases de présélection. Cette année donc, nous voulons rattraper le coup. Je demande aux jeunes stylistes de prendre leur mal en patience et de nous retrouver très bientôt, lors de la finale prévue le 12 février prochain, au King Fahd Palace. J’ai proposé à Amina Badiane de défiler ce jour-là. Si elle accepte, ce sera l’occasion pour le public de la découvrir sur les planches.

Au son de votre voix, l’ivresse, votre flamme pour la mode, est toujours intacte, malgré le poids de l’âge et toutes les péripéties liées à l’organisation…

Absolument ! Malheureusement, l’Etat n’a jamais voulu s’investir dans ce comité. C’est quelque chose que je déplore fortement. Ce n’est pas normal qu’on distribue des centaines de millions un peu partout et qu’on ne s’intéresse pas à la mode. Pour beaucoup de gens, la mode, c’est des futilités, alors qu’ailleurs, c’est l’une des premières industries et cela fait vivre des centaines de personnes. Et pourtant, pour un pays où on se targue d’avoir les plus belles filles d’Afrique, on n’est pas capable d’organiser plus d’un défilé par an. Il faut donner un sacré coup de pouce à ce secteur. Les stylistes sont en train de crouler sous le poids des dettes. Lorsque Youssou Ndour a été nommé ministre de la Culture, je nourrissais de grands espoirs. Mais apparemment, lui-même s’est heurté à une cloison. Ce n’est vraiment pas faire injure au Président actuel mais, du temps de Wade, nous étions mieux traités…

 «J’ai subi tellement de pressions et je n’avais plus rien à prouver»

 Le manque de soutien de la part de nos gouvernants, vous a donc, en grande partie, poussé à la sortie avant l’heure ?

En grande partie oui. Je n’avais informé personne de ma décision, à part ma proche famille. Je dois avouer que j’ai fini par me résigner. J’ai subi tellement de pressions que finalement, je me suis dit qu’il fallait céder, d’autant plus que je n’avais plus rien à prouver.

Vous êtes indubitablement un «faiseur de reines», pour avoir propulsé au devant de la scène, beaucoup des mannequins de renom au Sénégal. Ne regrettez-vous que l’aventure Miss Sénégal se termine ainsi, sans fanfares pour vous ?

Chacun a son propre destin que le Bon Dieu, lui a assigné. Je m’accommode au mien et je rends grâce au Seigneur. J’aurais pu finir sur les routes, quelque part dans le Sénégal que nous avons parcouru dans toute son étendue, à plusieurs reprises. Heureusement, mon enthousiasme et mon envie m’ont toujours porté et poussé à avancer, même dans l’obscurité. Je souhaite plein succès à mes dauphins. Franchement, je n’ai pas d’amertume, je pars en étant tranquille, même si je suis déjà nostalgique. Il faut se faire à l’idée que la vie, c’est comme ça. Aujourd’hui, vous êtes en plein soleil et demain, vous vous retrouvez dans le noir. Ce qui n’est pas encore mon cas et je remercie le Ciel pour cela. Je vais peut-être devoir me réadapter à une vie avec moins de fracas, mais ce n’est pas pour autant que je vais arrêter de vivre. Ma société tourne toujours autour de l’événementiel.

 Quels sont vos plus beaux souvenirs de toutes ces années où vous étiez à la tête du comité ?

Ce sont ces défilés que nous avons organisés à l’extérieur. Je me rappelle la fois où nous avons fait vivre la mode sénégalaise en France, aux Galeries Lafayette, pendant une semaine. Nous avions eu un succès fulgurant. Un tel succès, nous l’avions aussi connu au Consulat du Sénégal en France. Je souhaite que cela continue aussi longtemps que possible, même après mon départ.

 Concrètement, qu’est-ce que Miss Sénégal vous a apporté ?

Je remercie le Bon Dieu…

Avez-vous pu réaliser vos rêves ?

On ne parvient jamais à réaliser tous ses rêves…

Les dernières éditions ne se sont pas déroulées dans le meilleur des cas… L’élection a perdu son standing d’antan, les sponsors ne suivaient plus et les scandales n’ont cessé d’émailler le concours… Au finish, ne peut-on pas dire que cela vous a fait plus de mal que de bien ?

Je n’ai pas senti de scandales, sauf ceux qui ont été fomentés. Au Sénégal, lorsqu’on est au devant de la scène, on réveille les rancœurs et suscite des jalousies.

Votre dernier mot ?

Je quitte la mare aux crocodiles…




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