L'ÉTAT SANTÉ DU CO-ACCUSÉ DE KARIM WADE, POMME DE DISCORDE ENTRE LE PARQUET ET LA DÉFENSE: LA CREI CONSIDÈRE BIBO APTE À COMPARAÎTRE
En ce onzième jour d’audience qui coïncide avec l’anniversaire du principal prévenu en l’occurrence Karim Wade (46 ans), il était question de vider les 17 dernières exceptions de nullité soulevées par les avocats de la défense. Mais dès la reprise de l’audience, la tension était dans l’air. L’état de santé d’Ibrahima Khalil Bourgi dit Bibo, un des co-accusés de l’ancien ministre d’État, était au centre de tous les débats.
Ce dernier, accusé de servir de prête-nom au fils d’Abdoulaye Wade dans plusieurs sociétés, est venu au tribunal avec quelques minutes de retard. Mais dès qu’il s’est présenté sur une chaise roulante avec deux bouteilles de perfusion accrochées un peu en haut à ses deux flancs, Me Corinne Dreyfus a voulu parler avec insistance de sa situation qu’elle juge alarmante. Le président de la Cour, Henri Grégoire Diop, s’oppose au motif que la parole ne lui est pas donnée.
Et lorsque le juge a voulu soumettre l’infirmier ambulancier qui accompagne Bibo à un interrogatoire, Corinne revient à la charge sans l’autorisation du président qui, visiblement agacé par l’obstination de l’avocate, lui remonte les bretelles. Maître Baboucar Cissé de la défense proteste vigoureusement contre l’intransigeance du président.
C’est le moment tant rêvé par le tonitruant avocat de la défense El Hadji Diouf pour sortir de ses gonds et chapitrer son collègue de la défense. Les invectives fusent dans la salle archi-comble, on se jette mutuellement des insanités. Sous les yeux du président, impuissant arbitre à son corps défendant de cette bataille verbale.
Après cet incident, l’infirmier accompagnateur interrogé sur son statut et la nature du contenu des bouteilles de perfusion, a avoué ne rien savoir sur ce que la cour lui demande. Et il déclare tout simplement assister le médecin en cas de pépin.
Ensuite le président s’est expliqué sur la maladie de Bibo sur la base du dossier médical qu’il a par-devers lui. Il rappelle que c’est la cour elle-même qui a nommé un cardiologue pour attester de la véracité des problèmes cardiaques dont souffrirait Bibo. Il a reproché à la défense de ne lui avoir pas fourni, depuis un an, un certificat afférent à la maladie cardiaque de Bibo.
En sus, aucune demande d’évacuation en France n’a été versée dans son dossier médical. Même le diabète dont son médecin traitant a fait état a été anéanti par les médecins de la cour. Et d’autres médecins saisis par la Cour ont fait savoir que le mal dont souffre Bibo peut bien être soignée au Sénégal, selon le président de la Cour. Ce qui semble vouloir dire, in fine, que la maladie du principal complice présumé de Karim Wade est en grande partie fictive. Ce justifie la décision de la Cour de le faire comparaitre.
C’est le méli-mélo au point que le président accepte de suspendre l’audience sur demande de Me Souleymane Ndéné Ndiaye, un des avocats de la défense. Ce dernier sollicite la présence du bâtonnier pour ramener la sérénité.
A la reprise, Me Ndiaye prend la parole pour apaiser le climat tendu. C’est à la suite que le médecin chirurgien urologue de Bibo est invité à la barre pour répondre aux questions relatives à sa maladie. Ledit médecin donne les raisons pour lesquelles son patient doit être évacué en France. Il soutient que son pronostic vital est engagé. Un deuxième chirurgien anesthésiste renforce les arguments développés par son collègue sur la nécessité d’évacuer Bibo.
L’audience suspendue à 13h reprend sur fond de tension entre le principal prévenu Karim Wade, appelé à la barre, et le président de la Cour qui veut lui lire la prévention. L’ancien ministre indique que ses avocats veulent prendre la parole avant la lecture. Ce que refuse le président qui fait lecture de la prévention sans tenir compte des requêtes de la défense. Visiblement désespéré, Karim est allé jusqu’à demander au président de le condamner puisque, selon lui, ses comportements intransigeants laissent croire à une condamnation pré-annoncée.
S’en suit une énième bataille de procédure. Les avocats de la défense demandent le renvoi du procès du moment que Bibo, pièce-maitresse du procès, n’est physiquement ni mentalement capable de répondre à des questions de la cour. En dehors des règles de droits, c’est une question de dignité humaine de renvoyer ce procès, arguent-ils. Ce qu’Antoine Diom, le substitut du procureur, ne cautionne point en invoquant les articles 398 et 403 du code procédure pénale.
Maîtres Simon Ndiaye et Yérim Thiam de la partie civile emboucheront la même trompette. Défendant eux aussi que, malgré son état fébrile, Bibo Bourgi peut se tenir devant un tribunal. Mais pour Clédor Ciré Ly et compagnie, de la défense, les articles 398 et 403 suffisent pour renvoyer le procès contrairement à la lecture que le parquet général en a fait avec la partie civile.
Finalement l’audience est fixée ce mardi à 10 heures pour délibérer sur la requête de la défense relative au renvoi du procès à une date précise
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