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Joseph Antoine Bell: " Le Sénégal ne survolera pas sa poule"


Mercredi 5 Octobre 2016

Comme à l’accoutumée, Joseph Antoine Bell, ancien international camerounais, dans un entretien accordé à Stades quotidien, jette un regard sans complaisance sur le football sénégalais.


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Le Sénégal a survolé les éliminatoires de la CAN-2017, pensez-vous qu’il peut rééditer ce parcours pour la qualification au Mondial 2018 ? 

Ce n’est pas comme ça qu’il faut parler. Tout en applaudissant ce que Aliou Cissé et ses garçons ont fait, je pense que lui-même ne serait pas d’accord d’entendre qu’il a survolé les éliminatoires de la CAN-2017. Je suis sûr qu’Aliou, après tous ses matchs, ne s’est pas pris pour supérieur à ses adversaires.

Au départ d’une nouvelle campagne, il ne va jamais dire qu’il va survoler sa poule. Il va prendre tous les matchs les uns après les autres. Mais surtout il va les prendre très au sérieux. Ce n’est qu’en essayant de les gagner tous qu’il pourra arriver éventuellement à se qualifier.

Quelle attitude ou stratégie lui conseillez-vous d’adopter au moment d’aborder ces éliminatoires pour le Mondial ?

Je n’ai pas de conseil particulier à donner à Aliou Cissé. Par contre, je lui fais l’amitié de lui faire confiance. Je lui conseillerais de ne pas s’attendre a survoler la poule mais de s’attendre à ce que l’équipe du Sénégal soit au meilleur d’elle-même. Là, si ça lui permet d’être premier, c’est bien. Si ça lui permet de survoler la poule ce sera simplement bien.

Qu’est-ce qui sera déterminant face au Cap-Vert que le Sénégal croise samedi pour le compte de la 1ère journée de ces éliminatoires ?

Il ne faut pas aller chercher ailleurs. Le Sénégal doit faire ce qu’il avait l’habitude de faire pour gagner. Après avoir remporté six matchs (dans les éliminatoires de la CAN 2017, ndlr), l’objectif d’Aliou Cissé doit être amélioré. Il a la capacité de se qualifier. Donc, il doit commencer à voir plus haut. Pour aller à la Coupe du monde, il va falloir de la qualité et Aliou doit intégrer dans son équipe la qualité de son jeu.

Êtes-vous d’avis, comme la plupart des observateurs, que le jeu du Sénégal est peu convaincant malgré les victoires ?

Si je devais juger aux résultats, je dis que quand on gagne six matchs d’affilée, on ne peut pas ne pas avoir convaincu au bout du sixième. À mon avis, ce serait très surprenant qu’on gagne sans convaincre au sixième match. Maintenant si les Sénégalais le disent, je me dis qu’après avoir gagné six matchs sans convaincre, il reste désormais à Aliou Cissé à bâtir une équipe qui va convaincre.

Qu’est-ce qui explique que depuis 2006, le Sénégal a du mal à franchir le cap du premier tour lors des phases finales de CAN ?

J’ai tellement bien suivi cette équipe que je me suis fait beaucoup d’ennemis au Sénégal (éclats de rires) avant éventuellement de me faire beaucoup d’amis. Ce qui se passe avec le Sénégal se passe ailleurs. C’est-à-dire, nous sommes à l’affût du moindre signe pour dire que nous sommes les meilleurs. On est chauvin et ce chauvinisme va à l’égocentrisme un peu. On veut vite et malheureusement, je ne vais pas m’excuser, que ce soit au Sénégal ou ailleurs, on a tendance à proclamer les choses sans pouvoir les réaliser.

Vous semblez insinuer que le Sénégal se voit trop beau alors qu’il n’a rien gagné…
Il faut que le Sénégal arrête de s’exalter des victoires qu’il n’a pas encore acquises sur le terrain. Et cela s’applique au continent dans son ensemble. En son temps, tout le monde a dit que l’Afrique a progressé parce qu’elle avait en son sein Drogba, Eto’o et Essien.
Nous-mêmes Africains, nous ne voyons pas l’aberration de ces déclarations occidentales. Aujourd’hui, c’est le cas avec le Sénégal qui regorge de bons footballeurs. Il a en son sein un certain Sadio Mané sur qui tout le continent africain doit compter, mais pour y arriver, il faut que ce Sénégal la travaille durement.
Comment le Sénégal doit-il procéder pour retrouver son lustre d’antan ?
Une équipe se construit dans le temps et je pense qu’Aliou doit s’y atteler avec l’aide des Sénégalais qui doivent arrêter de le mettre au sommet avant qu’il n’y arrive. Maintenant, accorder ce temps ne doit pas désespérément impliquer de la complaisance. Moi, je ne réclame pas pour Aliou de la complaisance.
Il doit et peut être critiqué sur des choix et sur la manière sans qu’on ne détruise tout. Il faudrait que ceux qui le critiquent le fassent sur des bases objectives et que lui et ses joueurs de l’autre côté acceptent la critique et travaillent à corriger ce qui est critique pour démontrer que la critique s’est trompée. Mais qu’on ne devienne pas des ennemis parce que les uns ont critiqué.

STADES

Abdoul Aziz Diop