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Insultes, dérapages et coups bas... les primaires républicaines avant le Super Tuesday


Mardi 1 Mars 2016

Jeb Bush a abandonné la course à l’investiture républicaine il y a une semaine et il est déjà regretté. Opposant de la première heure à Donald Trump, il avait choisi de combattre ses idées et son style avec ses mots. Son plus gros dérapage était intervenu lorsqu’il avait qualifié le magnat de l’immobilier d’« abruti » après que ce dernier avait moqué un journaliste handicapé. Le très policé Bush s’était aussitôt excusé auprès de sa mère, la tutélaire Barbara, pour son inconvenance. Et M. Trump avait continué de trôner dans les intentions de vote, puis dans les urnes.

Tirant les leçons de l’échec de son ancien mentor, le sénateur de Floride Marco Rubio, que l’establishment républicain a promu au rang de meilleur rempart contre le magnat de l’immobilier, a décidé au contraire de se battre sur le terrain de ce dernier, celui de l’injure et de l’outrance. Le résultat est un peu déconcertant pour qui s’était habitué aux tirades optimistes du jeune sénateur de 44 ans, chantre d’un « nouveau siècle américain » nécessairement magnifique.

Début février, Marco Rubio s’était inquiété de l’impact de la campagne dominée par M. Trump sur ses quatre enfants qui le suivent dans ses déplacements. Avec l’élégance d’un latéral droit du PSG, le magnat de l’immobilier venait de qualifier de l’équivalent de « fiotte » (« pussy ») son rival Ted Cruz, sénateur du Texas, et l’élu de Floride avait été interrogé sur le sens de ce terme par l’un de ses fils.


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On imagine que les quatre enfants du sénateur ont été évacués de toute urgence vers Miami depuis que leur père s’exprime comme un charretier à propos du favori de la course à l’investiture républicaine. Non content de le qualifier désormais d’« escroc », Marco Rubio a laissé entendre  que M. Trump redoutait de « mouiller son pantalon » pendant les pauses hygiéniques des débats  télévisés, puis il a moqué de « courtes mains ».

Cette transformation du gendre idéal en petite frappe est périlleuse. D’une part parce que M. Cruz, d’origine cubaine comme M. Rubio, occupe déjà le segment de la parodie de Tony Montana, le Scarface déjanté de Brian De Palma.

Ce rhéteur redoutable, qui crache les arguments aussi efficacement que le fusil d’assaut brandi par Al Pacino vomit les balles, a même inspiré un street artist, Sabo, qui a représenté le sénateur du Texas le torse couvert de tatouages, une cigarette pendant à ses lèvres. Un résultat jugé longtemps cool, jusqu’à ce que l’équipe de campagne de M. Cruz se rende compte que Sabo postait par ailleurs des messages particulièrement racistes sur son compteTwitter.

Copier M. Trump au chapitre de l’attaque ad hominem risque enfin d’être particulièrement ardu pour M. Rubio. Il aura fort à faire  pour s’imposer dans un registre où le magnat de l’immobilier ne se donne aucune limite. M. Rubio, qui veut plaire  à la fois à la retraitée républicaine fortunée de Boca Raton, au col-bleu en colère de l’Ohio, et aux capitaines d’industrie  et de la banque qui sont aussi ses donateurs, risque fort le lumbago sémantique alors que la course républicaine aborde l’épreuve du « Super Tuesday », mardi 1er mars.

LEMONDE.FR


Abdoul Aziz Diop