Fusillade de Charleston: ce que l’on sait du suspect, Dylann Roof
Vendredi 19 Juin 2015
Un suspect a été interpellé suite à la fusillade qui a fait neuf morts, six femmes et trois hommes, tous noirs, dans une église fréquentée par cette communauté à Charleston dans le sud-est des Etats-Unis mercredi 17 juin. Dylann Roof, 21 ans, a été arrêté le lendemain à Shelby, en Caroline du Nord, lors d’un contrôle routier à 400 kilomètres de la tuerie. Il a été ramené à Charleston pour y être inculpé.
Sur l’un des portraits diffusés par la police - une photo publiée sur sa propre page Facebook -, Dylann Roof apparait debout sur fond de marécages, regard noir sous une coupe Tom Sawyer, avec sur la poitrine, cousus au manteau, deux drapeaux : celui de l’ancienne Afrique du Sud blanche et ségrégationiste, et celui de la Rhodésie, autre pays d’Afrique fondé par des colons européens et devenu par la suite l’actuel Zimbabwe. C’est la haine des Noirs qui aurait conduit ce jeune Américain blanc de Caroline du Sud à assassiner neuf personnes.
Des témoins auraient même entendu le tireur dire qu’il venait tuer des gens « parce qu’ils sont noirs ». Un rescapé raconte qu’il lui a dit : « Je dois le faire, parce que vous violez nos femmes et prenez le contrôle du pays. » Avant de commencer sa tuerie, le jeune homme avait pourtant été accueilli à bras ouverts par les participants à une classe d’études bibliques, dont plusieurs pasteurs. Il avait déclaré son intérêt pour le livre saint et était resté une heure avec les autres participants avant de sortir son arme et de faire feu.
Un sourire satisfait sur le visage du suspect
C’est la publication de sa photo et du numéro de la plaque de son véhicule qui ont permis la rapide arrestation de Dylann Roof, 14 heures après la fusillade. Un fleuriste l’a reconnu et a alerté la police. Probablement identifié grâce aux caméras de surveillance, le suspect n’était pas un inconnu des services judiciaires. Ce mauvais élève, qui avait souvent changé d’école et avait dû redoubler sa dernière année d’études secondaires, avait déjà eu affaire à deux reprises à la police depuis sa majorité pour possession de drogue et pour violation de propriété.
Après son interpellation, il a été ramené en fin d’après-midi, jeudi, à bord d’un petit bi-moteur à Charleston pour y être inculpé, pour le meurtre de six femmes et de trois hommes noirs, âgés de 26 à 87 ans. Sur les images, après son arrestation, on le voit revêtu de la tenue traditionnelle des prisonniers, une combinaison à rayures noires et blanches, un gilet pare-balle, et enchaîné à la ceinture et aux poignets. Il semble avoir sur les lèvres un petit sourire satisfait, rapporte notre correspondant à Washington, Jean-Louis Pourtet.
Contrairement à Ferguson et Baltimore, il n’y a pas eu de manifestation violente jusqu’à présent à Charleston. Le chef de la police et le maire, qui sont des Blancs tous les deux, ont immédiatement dénoncé avec force la tuerie, et pris toutes les dispositions nécessaires, avec l’aide du FBI et du gouvernement fédéral, pour traquer l’agresseur. Les religieux noirs ont aussi joué un rôle important pour contenir toute explosion de violence, et toute la population de Charleston, toutes couleurs confondues, s’est solidarisée avec les familles des victimes et leur a apporté un soutien.
« Le cœur de la Caroline du Sud est brisé »
Le président américain s’est dit réconforté par la réaction de la population de Charleston. Barack Obama a qualifié la tuerie de « meurtres insensés ». C’est la 14e fois qu’il doit jouer les consolateurs en chef après une fusillade. Il en a profité pour dénoncer le manque d’encadrement des ventes d’armes à feu aux Etats-Unis, et demander une nouvelle fois au Congrès de renforcer la loi, ce qu’il n’a jamais pu obtenir en six ans et demi de présidence, en raison de l’influence de la NRA, le lobby des armes, sur les élus.
Lors de son interpellation, Dylann Roof était armé d’un revolver 45 mm. Selon un individu qui s’est présenté comme son oncle aux médias américains, le jeune homme avait reçu une arme comme cadeau d’anniversaire par son père. C’était en avril dernier. Un cadeau funeste qu risque fort de coûter à son fils une condamnation à mort. L’heure est néanmoins au deuil. La gouverneure républicaine a reçu les familles des victimes pour les réconforter: « Le cœur de la Caroline du Sud est brisé », a-t-elle déclaré.
• Déclaration de Barack Obama
« Il y a quelque chose de particulièrement douloureux dans le fait que la fusillade se soit produite dans un lieu où nous cherchons le réconfort et la paix, un lieu de prière, a dit le président américain. Mère Emmanuel est plus qu’une église, c’est un lieu de prière fondé après que des Américains ont aspiré à la liberté. C’est un endroit qui a été réduit en cendres, parce que ceux qui le fréquentaient ont travaillé à mettre fin à l’esclavage. Quand l’église a été détruite, ils ont continué à servir le culte en secret. »
« Certains de nos plus brillants leaders se sont exprimés depuis les marches de cette église, a rappelé M. Obama. C’est un lieu sacré dans l’histoire de Charleston et dans l’histoire des Etats-Unis. Le fait que le drame se soit produit dans une église de la communauté noire nous interroge évidemment sur les pages sombres de notre histoire. Ce n’est pas la première fois qu’une église de la communauté noire est attaquée. Et on sait que la haine, croisée au racisme, est une menace pour notre démocratie. »
GFM
Abdoul Aziz Diop
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