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Opinion

Édito de Seneplus: Opposition à la rue! Par Momar Seyni Ndiaye


Mercredi 25 Novembre 2015

Le FDPR devra imaginer d’autres modes de combats pour faire plier le pouvoir. On voit mal l’Assemblée nationale, soumise à un intense tir groupé, déchoir Diagne Fada de son «perchoir» indu


Ainsi donc, l’opposition réunie au sein du FRPD a appuyé sur la pédale de frein. Renonçant à son rassemblement prévu ce mercredi devant l’Assemblée nationale, point culminant de sa tumultueuse et sulfurique entreprise de dénonciation de ce qu’elle considère comme les dérives du pouvoir. Le PDS et ses alliés ont-ils été convaincus par les arguments de conciliateurs crédibles, comme le laisse croire la thèse officielle ? Ont-ils reculé face au risque d’échec de la mobilisation qui se profilait ? En tout cas, leur détermination à trainer le pouvoir dans la boue reste intacte.

Loin s’en faut, ce n’est pas la première fois que, désemparés face à l’entêtement de la majorité, les opposants ont recours à ce stratagème, pour ternir son image et espérer obtenir des concessions politiques majeures. Le PDS est très familier à cette pratique. Elle l’a maintes fois, expérimentée contre le régime de Diouf. Et les opposants à Wade en ont usé et abusé moult fois, sans que les résultats obtenus à chaque séquence fussent à la hauteur de leurs espérances. Cette forme de lutte politique n’a pas vraiment prospéré dans le passé. Il y a donc peu de chance qu’elle le soit maintenant. Incapable de réussir ses mobilisations populaire, l’opposition pourra t-elle réussir son combat par procuration. Rien n’est moins sûr !

En effet, la randonnée dans les chancelleries et les cercles maraboutiques n’a jamais été vraiment productive. Les contestataires trouvent souvent portes ouvertes et oreilles attentives chez leurs interlocuteurs embarrassés d’être subitement les arbitres d’un conflit politique. Ils ne peuvent que manifester un timide soutien, ou se réfugier derrière un mutisme impénétrable. Mais jamais une action déterminante, une pression même amicale, une admonestation encore moins des sanctions contre le régime en place.

Et pour cause, les chancelleries évitent selon le langage diplomatique de se mêler des affaires internes d’un pays. Surtout quand les violations dénoncées n’ont l’ampleur pas d’une calamité économique et sociale. Les écarts démocratiques y sont alors considérés comme les soubresauts d’incidence très limitée. Le droit d’ingérence ne s’exerce pas aussi contre un pays allié.

Idem pour les forces maraboutiques, «très régimistes», qui se bordent à formuler des prières et des promesses de conseils aux gouvernants. Un rôle de relais, sans plus ! Alors l’opposition, devant une démarche si peu fructueuse tente la mobilisation populaire, en s’appuyant, sur le symbolisme de la journée du 23 juin 2011.

On se souvient que face à la trouille des partis politiques opposés à Wade, les jeunes et la société civile avaient renversé la table et pris le chemin de la Place Tatcher pour empêcher le vote d’une loi scélérate. Sans cette détermination populaire et citoyenne, Wade allait se donner les moyens de gagner l’élection présidentielle du 22 mars 2012, dès le premier tour en faisant sauter entre autres, le verrou du quart bloquant. Et du coup, imposer aux Sénégalais son fils, comme un successeur constitutionnel. Quelle perfidie heureusement tuée dans l’œuf !

Face à la violence institutionnelle, les jeunes, étudiants et citoyens pas très ordinaires, avaient donc répliqué par une violence spontanée et salvatrice dans laquelle, les partis politiques constitués n’avaient joué qu’un rôle supplétif. Wade a reculé, malgré toutes les alternatives cosmétiques qu’il cherchait à substituer à son sombre dessein, pour un résultat à l’identique.

Les responsables politiques avaient ce jour mémorable, certes, affiché leur tronche devant les caméras. Personne n’était dupe, leurs arrière-pensées récupératrices ont été dévoilées. Le M23 reste un mouvement populaire, exemplaire et avec cette historique victoire reproductible au Burkina en octobre 2014, pour chasser le dictateur compulsif Blaise Compaoré.

Aujourd’hui, le FDPR veut en faire un remake, en pensant que les mêmes causes produiraient les mêmes causes. Grandissime erreur ! Certes, l’Assemblée nationale reste le même terrain de conflit en 2011 qu’en 2015. Normal, c’est le lieu privilégié d’expression de notre démocratie représentative. Là s’arrête la comparaison.

Aujourd’hui, la crise interne au PDS, incapable comme d’habitude de gérer ses jacqueries, aggravée par la bienveillante complicité du pouvoir et de la majorité parlementaire, constitue le point d’orgue de ces évènements politiques. Il n’y a pas de crise politique au Sénégal à l’heure actuelle. Les institutions fonctionnement en dépit des dérives notées dans la malencontreuse interprétation des articles 20 et 22 traitant de la constitution ou de l’installation des groupes parlementaires. La majorité présidentielle a pris faits et causes pour Modou Diagne Fada rejeté par son propre parti. Cette perte de légitimité politique suffit à disqualifier le chef des Rénovateurs sanctionné, à tort ou à raison, pour irrédentisme.

L’entêtement de Fada est à la mesure des fadaises qu’il sert pour justifier son maintien dans un groupe sans effectivité. Il a perdu la majorité des députés de l’ex-groupe et devrait normalement, passer la main, conscient qu’il a lui-même, bien des fois, bénéficié des errements de la direction du PDS.

Modou Diagne Fada n’est pas homme politique à se laisser faire, il est vrai. Il a croisé le fer avec Wade en 2005 après que Thierno Lô lui eut ravi la vedette lors de la constitution des listes pour les élections locales, à Darou Moukhty. Il prit son courage à deux mains, en créant sa propre liste, «War Wi», et gagner trois postes de députés (plus 80 000 voix). Une autre fois, sa proximité prétendue ou réelle avec Idrissa Seck alors pestiféré dans son propre parti, lui avait valu d’avoir été écarté du gouverné pendant cinq ans. On peut donc comprendre son exaspération devant tous ces faits du Prince, qu’il veut remettre en cause, après en avoir bénéficié. Et là est le hic. Et Fada est désespérément amnésique de ce passé si récent, avec une mémoire si sélective. Et tant que Wade gérera le PDS, même depuis son repaire de Versailles, c’est pratique sera en prévalence.

Fada a une longueur d’avance sur le PDS, mais sa marge de manœuvre est encore trop étroite. Et sa proximité annoncée avec le pouvoir le rend encore plus impopulaire, perçu qu’il est comme le Cheval de Troie, qui chercher à miner le PDS de l’intérieur. Son coefficient (ou indice) de victimisation n’est pas encore assez élevé pour mériter- ce fut le cas de Macky en 2009-, l’empathie des Sénégalais.

Malgré le bien-fondé politique du Front pour déplorer et dénoncer la «collusion» entre le pouvoir et le dissident Fada, en dépit des inadmissibles dérapages dont l’Assemblée nationale a été le théâtre, lors des débats en commission, une mobilisation populaire pour chahuter les débats du 25 juin est saugrenue et démesurée. Certes l’injustice faite au PDS est tellement démentielle qu’on peut se demander ce que devra faire ce parti pour recouvrer ses droits.

Avec les près de 140 députés de la Majorité, l’Assemblée nationale est déjà assez réduite en caisse de résonance, pour se priver d’un contrepoids certes symbolique mais significatif, d’un groupe parlementaire actif et pas complaisant pour un sou. Le FDPR devra probablement imaginer d’autres modes de combats pour faire plier le roc au pouvoir. On voit pas mal l’Assemblée nationale et son président soumis à un intense tir groupé, revenir sur leur décision et déchoir Diagne Fada de son «perchoir» indu.

Le FDPR prenait un grand risque en tentant une mobilisation dont le succès était loin d’être garanti. À moins qu’elle ne cherchait à travers une éventuelle répression policière forte, un moyen d’attiser le feu. Une bavure policière est possible à tout moment et pourrait faire tout basculer dans une crise.

Seul Modou Diagne Fada détient la solution du problème. Sa démission de ce poste usurpé pourrait prévenir tout débordement. En transférant le «bâton merdeux» à Niasse, Macky Sall évite de se mettre au premier rang des difficultés, malgré les accusations non prouvées de subornation de Fada. Il faut croire que la haine et le courroux entre les ex-frères de parti sont tellement denses qu’ils ont affecté le PDS et durablement les plus hauts sommets de l’État

SENEPLUS




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