International

Conférence de presse de Hollande : les 10 thématiques (non-people) auxquelles il n'échappera pas


Mardi 14 Janvier 2014

st avec quelques semaines de retard sur le calendrier que François Hollande honorera ce mardi 14 janvier sa promesse de tenir une grande conférence de presse tous les semestres. Le président de la République espérait sans doute que la trêve des confiseurs aurait calmé les esprits avant de se confronter à nouveau aux quelques centaines de journalistes accrédités pour ce grand oral bi-annuel dans la salle des fêtes de l'Elysée. C'est raté.

L'actualité, dominée jusqu'ici par ses promesses déçues sur le chômage et la querelle nationale sur les quenelles de Dieudonné, a connu un tournant autrement plus délicat à négocier pour celui qui avait promis "un comportement exemplaire" devant les Français. Les photos du magazine Closer lui prêtant une liaison avec l'actrice Julie Gayet, suivies de la nouvelle de l'hospitalisation de Valérie Trierweiler ce week-end, ont fait l'effet d'une bombe médiatique dont les déflagrations n'épargneront pas l'hôte de l'Elysée.

Qu'importe si le chef de l'Etat espérait surtout détailler sa feuille de route économique ainsi que son pacte de responsabilité promis le 31 décembre dernier. Tant pis sil a prévenu qu'il défendrait son droit à la vie privée, y compris devant les tribunaux. Une voire plusieurs questions devraient lui être posées ce mardi sur ce sujet aussi intime qu'explosif.

Raison de plus pour se remémorer les (véritables) dossiers qui engagent le destin de la France en 2014. Voici les dix questions embarrassantes et garanties sans people auxquelles François Hollande ne pourra pas se soustraire.

LA QUESTION LE FIGARO - M. le Président, vous engagez-vous à inverser la courbe du chômage d'ici à la fin 2014?
Remuer le couteau dans la plaie. Promesse emblématique de François Hollande en 2013, la courbe du chômage ne s'est pas ou peu inversée l'an dernier et les perspectives sur le front de l'emploi ne sont guère plus rassurantes pour 2014. François Hollande osera-t-il réitéré son pari cette année, au risque de jouer à quitte ou double?

Le président a déjà dégainé le 31 décembre dernier en évoquant son pacte de responsabilité avec les entreprises, liant baisse des charges contre créations d'emplois. Encore faut-il que ce pacte soit réellement mis en application et qu'il soit suivi d'effets. Ce qui, dans tous les cas, prendra du temps.

LA QUESTION MINUTE - M. le Président, interdire par avance les spectacles de Dieudonné, n'est-ce pas une atteinte à la liberté d'expression?
La polémique a étouffé l'actualité du passage de 2013 à 2014. La circulaire Valls adressée aux maires et préfets afin d'interdire le spectacle aux relents antisémites du polémiste Dieudonné a certes été confirmée dans sa légalité par le Conseil d'Etat. Mais elle a également assuré une promotion exceptionnelle à l'ancien compère d'Elie Semoun tout en réveillant les craintes pour la liberté d'expression, y compris au sein de la majorité socialiste.

Faut-il laisser Dieudonné déraper, quitte à le poursuivre en justice à chaque dérapage? Ou bien faut-il l'empêcher de nuire en invoquant u ntrouble à l'ordre public? L'arbitrage du président de la République est plus que jamais attendu sur cette question qui, au-delà d'une vaine polémique, engage jusqu'aux valeurs de la République.

LA QUESTION CAPITAL - M. le Président, le "pacte de responsabilité", au fait, c'est quoi?
Annonce majeure des voeux de la Saint-Sylvestre, le "pacte de responsabilité" doit engager les entreprises à créer des emplois en échange de baisses des charges. Séduit, le Medef promet 1 million d'emplois sur 5 ans si le coût du travail est une nouvelle fois revu à la baisse.

Mais cette proposition pose autant de questions que de réponses. Quelles seront les charges qui baisseront? A quelles conditions? Comment évitera-t-on les effets d'aubaines? Et surtout, qui financera cette baisse des charges alors que la TVA vient d'augmenter pour financer (en partie) les 20 milliards du pacte de compétitivité promis fin 2012? François Hollande s'est pour l'heure engagé à de nouvelles mesures d'économies. Mais sur qui pèseront-elles? Et ne risquent-elles pas de freiner les efforts de désendettement?

LA QUESTION EURACTIV - M. le Président, quelles initiatives prendrez-vous avec Mme Merkel pour empêcher un nouveau record d'abstention aux européennes de mai?
Lors de ses voeux aux Français, le président de la République s'est posé en champion de l'Europe contre les souverainistes de tous bords à quelques mois des élections européennes. Ce dernier a proposé des initiatives franco-allemandes pour relancer la construction européenne, tout en appelant de ses voeux une majorité progressiste susceptible d'inverser l'orientation libérale du Parlement européen. Pas évident de lier les deux avec une Angela Merkel bien décidée à ne rien se laisser imposer à Bruxelles.

Problème, et au-delà des tensions qui persistent entre Paris et Berlin, rares ont été les initiatives communes couronnées de succès, de l'anniversaire raté du Traité de l'Elysée à la promesse d'une taxe sur les transactions financières européennes.

LA QUESTION L'HUMANITE - M. le Président, soutenez-vous la séquestration par un syndicat de deux dirigeants de Goodyear à Amiens?
En 2013, François Hollande avait tranché contre la loi d'amnistie sociale censé absoudre les actions musclées (débordements, violences, séquestrations) des syndicats sous le précédent quinquennat. Mais la crise et les plans sociaux se poursuivant, la question se pose une fois encore après la séquestration de deux cadres de Goodyear à Amiens.

Alors que le "redressement productif" promis par Arnaud Montebourg tarde à faire ses preuves, François Hollande cherchera-t-il à ménager des syndicats à bout de souffle afin d'encourager les premiers succès de la négociation paritaire?

LA QUESTION LE HUFFPOST - M. le Président, confirmez-vous votre visite d'Etat aux Etats-Unis alors que les renseignements américains espionnent ouvertement la France et l'Europe?
C'est le plus grand scandale d'espionnage de ce début de XXIe siècle. La révélation d'un programme d'espionnage électronique américain aux ramifications tentaculaires, baptisé Prism, aurait pu (ou dû) entraîner des excuses publiques des Etats-Unis qui ont surveillé non seulement les dirigeants mais également les simples citoyens du monde entier, alliés compris. L'affaire a encore rebondi fin décembre lorsque Edward Snowden, ancien consultant de la NSA, a révélé qu'une division spéciale de l'agence avait piraté le réseau informatique d'un consortium de sociétés utilisant le câble sous-marin de télécommunications Sea-Me-We 4.

Si le Brésil a fortement réagi en annulant une visite d'état à Washington, François Hollande n'a que peu réagi à la nouvelle et se rendra aux Etats-Unis en février.

LA QUESTION LES ECHOS - M. le Président, la grande réforme fiscale annoncée par votre premier ministre entraînera-t-elle une baisse des impôts?
Annonce surprise du premier ministre Jean-Marc Ayrault, la grande réforme fiscale sera l'un des chantiers majeurs de cette année 2014. Problème, personne ne sait en quoi elle va consister. Fusion de la CSG de l'impôt sur le revenu, mensualisation de l'IR, nouvelles tranches... Toutes les pistes (ou presque) sont ouvertes.

Mais la vraie question demeure: le gouvernement va-t-il s'engager à baisser la pression fiscale dans les années à venir après deux exercices où le porte-monnaie des Français a été soumis à rude épreuve?

LA QUESTION TÊTU - M. le Président, avez-vous définitivement renoncé à autoriser la procréation médicalement assistée pour les couples lesbiens?
Véritable arlésienne du quinquennat, la question de l'ouverture de la PMA aux couples de femmes demeure ouverte. La proposition, majoritairement soutenu à gauche mais qui ne figurait pas dans le programme présidentiel, devait être intégrée au projet de loi sur le mariage pour tous, avant d'être renvoyée à la future loi Famille. Finalement, elle n'y figurera pas et dépendra strictement de l'avis du conseil national d'éthique, dont les réticences sur la question sont bien connues.

Reste un besoin de clarté de la part du chef de l'Etat. Est-il oui ou non favorable à la PMA, au risque de réveiller la Manif pour tous qui ne demande que cela?

LA QUESTION COURRIER INTERNATIONAL - M. le Président, l'armée française est-elle en train de s'embourber seule en Centrafrique?
Après le succès de l'opération Serval, le casse-tête de l'opération Sangaris. L'intervention française en Centrafrique, pays miné par la guerre civile, se révèle bien plus complexe que prévue, entre règlements de compte meurtriers et crise politique. L'opposition, qui avait déjà brandi la menace d'un bourbier au Mali, réitère ses injonctions.

Les indices d'une (fragile) amélioration sont pourtant là. Quelques médiations de l'armée française ont déjà fait leurs preuves et la démission du président centrafricain contesté a semble-t-il calmé certaines factions rebelles. Reste l'isolement de la France sur qui pèse l'essentiel de l'effort de guerre.

LA QUESTION LE MONDE - M. le Président, exigerez-vous, comme ils s'y sont engagés, des parlementaires socialistes élus maires aux municipales d'abandonner un de leurs mandats?
Les élections municipales approchant à grand pas, la question du non-cumul des mandats se pose de manière plus aigue encore. Signe que le cumul maire-parlementaire demeure une majorité, le Parlement cessera ses travaux pendant cinq longues semaines entre mars et avril pour permettre aux élus de battre campagne, repoussant de fait... l'adoption de la loi interdisant le cumul des mandats.

Une contradiction flagrante avec les engagements de campagne du président, qui a d'ores et déjà renoncé à imposer le non-cumul dès 2014. Mais les parlementaires socialistes s'étaient engagés à montrer l'exemple, avec ou sans loi. Raison de plus pour le leur rappeler.

SENEWEB.COM



Abdoul Aziz Diop