Cinéma-Hommage: Toute la filmographie de Sembène était orientée vers "le dialogue avec son peuple" (Biographe)
Le défunt homme de culture Sembène Ousmane voulait que "son art ait une fonction sociale" en orientant "sa filmographie vers le dialogue avec son peuple", selon son biographe Samba Gadjigo.
"Sembène malgré ses défauts, personne ne pouvait lui enlever son amour inconditionnel pour son peuple et la quête de moyens de communication avec son peuple, ce qui fait qu’en 1969, il a été le premier à faire un film en wolof +Mandat Bi+ et jusqu’à sa mort ( le 9 juin 2007) il a fait des films en wolof, en diola", a dit Gadjigo dans un entretien avec l’APS.
Selon lui, "Ousmane Sembène a commencé à faire du cinéma car il s’est rendu compte qu’écrire des romans en langue française n’était pas accessible à l’époque à plus de 70% des Sénégalais. Or, lui voulait que son art ait une fonction sociale".
Il explique que le réalisateur sénégalais voulait que "cela soit un art militant et que comme nos anciens griots que l’artiste soit la pulsion même du peuple".
"Or, poursuit-il, cela ne pouvait pas se faire avec nos langues étrangères, il faut que ce soit des symboles et des métaphores qui soient accessibles au citoyen lambda et c’est pour cela qu’il s’est tourné vers le cinéma".
"Sembène était prêt à tuer pour faire ses films et toutes sa filmographie depuis Borom Sarett (1962) à Moolaadé (2004), il y a eu cette constance orientée vers le dialogue avec son peuple", a rappelé Samba Gadjigo, professeur de français et de littérature africaine à Mount Holyoke College (Massachusetts, Etats-Unis).
Pour preuve, fait-il remarquer, Sembène "a été le premier à faire du cinéma forain car à l’époque il n’y avait pas d’électricité dans nos villages et il n’y avait pas de salle de cinéma".
Le biographe de Sembène explique qu’"il prenait une camionnette, un projecteur et faisait le tour des villages pour montrer ses films et créer le dialogue avec ses populations".
Samba Gadjigo est également l’auteur du film documentaire "Sembène !" coréalisé avec l’américain Jason Siverman sorti en 2015 et projeté pour la première fois en compétition aux Festivals Sundance et Cannes.
Le documentaire réalisé avec un budget de plus de 350 millions de FCFA a également été vu dans plusieurs pays dans le monde à travers plus d’une centaine de projections et en 2015, il faisait partie de la liste des 7 meilleurs films et des 10 meilleurs films choisis par le New York Magazine.
Du 9 au 11 juin, une dizaine de films de Sembène Ousmane tels que "La noire de..", "Guelewaar", "Le mandat" ou "Xala", "Emitai", "Manda-bi", seront projetés gratuitement, sur l’ensemble du territoire national pour célébrer les 10 ans de sa disparition, grâce au projet co-initié par Gadjigo intitulé "Sembène Across Africa" ou "Sembène à travers l’Afrique".
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