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Pape Mor Djité et son ami, Talla Diassé, ont été jugés dans la nuit du mardi 7 au mercredi 8 février 2017 par la Chambre criminelle du tribunal de grande instance de Dakar. Poursuivi pour association de malfaiteurs, assassinat, recel de cadavre et non-dénonciation de crime, Pape Mor Djité avait voulu, devant la barre, faire croire au tribunal que le défunt a été victime d’une mort accidentelle.
Technicien supérieur en informatique et célibataire sans enfant, il est accusé d’avoir tué par strangulation Boutèye Kounta Ndiaye.
Devant le juge, il s’est montré impassible : « Je ne reconnais pas les faits de préméditation. J’estime que c’est un accident. Je vais raconter ce qui s’est passé pour être quitte avec ma conscience. Je sais que c’est une affaire que je n’oublierai jamais de ma vie ».
Informaticien de formation, il explique qu’il s’était recyclé en guide touristique, convoyeur de véhicules, puis intermédiaire dans des opérations de vente de véhicules. C’est d’ailleurs à cette occasion qu’il a croisé le chemin de Boutèye Kounta Ndiaye.
Grâce à un site de ventes en ligne, il a pu joindre M. Ndiaye. Il lui explique qu’il veut le mettre en contact avec un Bissau-Guinéen qui veut acheter un Range Rover. Les deux parties s’entendent sur 30 millions F CFA. Ne disposant pas de ce type de véhicule, le défunt lui propose sa Porche Cayenne à 20 millions de F CFA.
« Le Guinéen s’appelle Viviano Lima. Il m’a appelé lors de mon séjour en Mauritanie pour me passer la commande. Boutèye Kounta devant nous fournir un véhicule de type Range Rover qui tardait à être livré, il a fini par proposer une Porche Cayenne à 20 millions. J’étais à Thiès. Dimanche, c’est lui qui m’a appelé. On s’est donné rendez-vous pour le lundi. Ce jour, il m’a appelé vers 8 h, m’invitant à venir le rejoindre dans son parking. Donc, si j’avais une intention inavouée, je ne me serais pas rendu dans son parking. On a été à l’ancienne piste voir un mécanicien, Assane Ndoye. Son atelier était situé près de Dabakh Automobile, mais celui-ci était absent des lieux. On a ensuite été à Yarakh (Hann). J’habite dans cette zone. J’ai, par la suite, appelé un apprenti pour voir l’état du véhicule qui se trouvait au bas de l’immeuble où j’habite, mais celui-ci a décliné. En attendant, Boutèye m’a demandé de nous rendre chez moi, le temps que son mécanicien arrive. C’était aux environs de 9 heures », racontait Pape Mor Djité devant la barre.
Les derniers instants de Boutèye Kounta racontés à la barre
En cette matinée du lundi 9 mai, Boutèye Kounta Ndiaye suit les pas de l’accusé, impatient de conclure l’affaire. Seulement, il ne sortira pas vivant de l’appartement de Pape Mor Djité. « Lorsque je franchissais le seuil de mon appartement, j’ai pu entrevoir, dans le sac Boutèye, la crosse de son arme. J’ai alors pris une barre de fer qui se trouvait sur les lieux et lui en ai asséné un coup. Je logeais dans cet appartement avec des ouvriers, des maçons, etc. Peut-être qu’une fois à l’entrée, voyant le désordre, il a voulu sortir son arme. Je n’avais aucune intention de lui faire mal. Je n’ai jamais fait de mal à une personne. Mais lorsque, subitement, il a sorti une arme, j’ai eu peur. Je me suis senti menacé. Je lui ai donné un coup. Je ne sais pas où exactement. Il est tombé. Sa tête a cogné le mur. Je l’ai vu agiter les mains. Mais, je ne savais pas comment lui venir en aide. Il était habillé en costume. Lorsqu’il est tombé à terre, j’ai vu sa langue sortir de sa bouche. Il y avait de la bave qui sortait. Ce qui m’est arrivé est un accident », narrait-il.
Selon lui, lorsqu’il s’est rendu compte que Boutèye était mort, il ne savait plus quoi faire. « J’ai réfléchi quelques minutes, puis je suis parti appeler deux hommes pour m’aider à le transporter. J’avais auparavant dissimulé le corps dans deux sacs. Mais les deux hommes sont repartis en courant en voyant le corps enveloppé. C’est ensuite que j’ai fait appel à Talla Diassé qui était à Thiès. Je suis allé acheter deux sacs et un rouleau de scotch. J’ai enroulé le corps dans un drap. Il était 10 heures environ. J’ai pris une voiture pour me rendre à Thiès. C’est vers Diamniadio que son épouse m’a appelé. Je lui ai fait croire que son époux était dans un bureau », poursuivait l’accusé.
Il embarque la dépouille dans une 7 places, faisant croire qu’il transporte un sac de poissons
À Thiès, il dit n’avoir pas trouvé Talla à son atelier de menuiserie. « Lorsque je l’ai finalement retrouvé, je lui ai dit qu’il est la seule personne, le seul ami sur qui je pouvais compter. Il a refusé dans un premier temps. Je lui ai fait savoir que j’allais prendre la fuite en Guinée, après. Il disait craindre d’avoir des problèmes. Mais j’ai fini par le convaincre. Il m’a accompagné à Dakar. Dans l’appartement, il ne voulait pas voir le cadavre. J’ai fait croire que je transportais du poisson. On a chargé le sac de riz contenant le corps dans un 7 places, un 505. On l’a déposé dans le véhicule. Le conducteur, Maguèye Guèye (il a obtenu un non-lieu), était quelqu’un qui avait l’habitude de travailler avec moi. Il m’a déposé à Thiès », explique-t-il.
L’enquête révèle qu’il s’est débarrassé du corps sous un tunnel de la Vcn (Voie de contournement Nord) de Thiès. Sur le corps, il a été découvert une cravate attachée à son cou, les poignets liés, les yeux bandés avec du scotch (bande adhésive). Pour toute réponse, l’accusé soutient : « Je ne l’ai jamais étranglé avec sa cravate.
« Je ne peux pas qualifier mon acte, je suis vraiment désolé »
Après s’être débarrassé du corps, Pape Mor Djité soutient qu’il ne savait plus quoi faire. « Je n’avais pas d’argent. Je n’avais que 5 000 Fcfa Cfa en poche. Je me suis mis au volant de la Porche Cayenne de Boutèye Kounta. J’ai pris 4 passagers moyennant 2 000 F CFA et suis allé à Mbacké. Je n’avais ni permis de conduire, ni pneu de secours, ni de l’argent, ni du carburant. Je savais que je ne pouvais pas traverser la frontière sans un permis de conduire. Je voulais juste m’approcher des frontières. J’ai eu une crevaison de pneu à Kounkané, la nuit. J’étais parti chercher un pneu et à mon retour j’ai trouvé des gendarmes près du véhicule. Ces derniers m’ont conduit à Thiès puis à Dakar. De retour à Dakar, j’ai rencontré le procureur vers 16 heures. Avec les enquêteurs, nous avons été à Thiès récupérer le corps qui était en état de décomposition avancée. Jusqu’à présent, je ne peux pas qualifier mon acte, je suis vraiment désolé. Je n’ai jamais eu la volonté de commettre un meurtre. Je ne suis pas violent. Je n’ai jamais fait la prison. C’est ma première incarcération. Et j’ai peur de la prison », disait-il au juge.