Faits Divers

12 ans de travaux forces pour l’immigre bissau-guinéen : Insuffisant rénal, greffé de deux reins

Arona Baldé avait avalé 600 grammes de cocaïne


Jeudi 28 Janvier 2016

La Chambre criminelle de Dakar a condamné, hier mercredi, l’immigré bissau-guinéen, Arona Baldé, à 12 ans de travaux forcés. Atteint d’insuffisance rénale, de diabète, le Bissau-guinéen qui prend 14 médicaments et deux injections par jour, avait ingurgité 60 boulettes de cocaïne, soit 600 grammes de drogue.
Comme ces prévenus de luxe qui, dès leur arrestation, soulèvent une maladie leur permettant d’être transférés au pavillon spécial, lui y a passé une bonne partie de sa détention préventive. Et les habitués de ce secteur réservé aux prisonniers malades le reconnaissent. Sa boule à zéro et sa barde d’arabisant sont trop voyants pour le laisser inaperçu. Arona Baldé, bonhomme au ventre bedonnant, qui fait plus que ses 36 ans, a attiré l’attention de ce collaborateur de Dame justice, surpris des faits de trafic international de drogue qui lui sont reprochés. «Depuis quatre ans que je le vois là-bas, jamais je n’ai pensé qu’il est arrêté pour de tels faits.» Une réaction compréhensible de cet adepte du palais de justice qui, informé de la maladie de Baldé et du risque qu’il a pris, n’en finit pas d’écarquiller les yeux de surprise. Oui, cet immigré Bissau-guinéen, en plus du diabète dont il souffre, est un insuffisant rénal qui a même subi une double transplantation à Madrid. D’ailleurs, sa maladie le contraint à prendre quatorze (14) médicaments et deux injections par jour. Malgré tout, Baldé a osé ingurgiter 60 boulettes de cocaïne, l’équivalent de 600 grammes. Un acte, véritable agression de son corps malade, qui a poussé la Chambre à le condamner à 12 ans de travaux forcés. C’était hier mercredi, au palais de justice de Dakar.
«Je n’avais pas de quoi acheter mon billet retour. A Bissau, je risquais de mourir…»
Immigré, résidant à Madrid, Arona vivait en Espagne depuis 2002 où il a commencé à travailler dans le bâtiment comme ferrailleur en 2007. Mais, le travail qu’il faisait en soulevant la ferraille, dont le poids est lourd, a été, dit-il, à l’origine de sa maladie. Marié et père de famille, il est devenu une loque humaine qui a dû changer ses reins pour vivre. Son salaire en a subi un sacré coup. Payé à l’heure, ses jours de dialyse sont défalqués. Ce qui a fait chuter ses émoluments mensuels de 1200 euros. Mais les déboires de Arona ont commencé, lorsque, malade et sans travail, sa femme perd un de ses parents. Il devait aller à Bissau. Seulement, il n’avait pas assez d’argent. Un de ses amis lui propose de faire le voyage en voiture. «J’ai déjà un client qui va acheter la voiture, une fois là-bas, je vais t’acheter le billet retour», lui aurait-il proposé. Arona accepte. La promesse de son ami ne sera jamais tenue. A 6 jours de l’expiration de sa carte de séjour, le bonhomme de 30 ans est dans le pétrin. «Je n’avais pas de quoi acheter le billet. Si je ne rentrai pas, ma carte de séjour allait expirer et si je restais à Bissau, c’était la mort assurée pour moi car, je ne pouvais pas m’y prendre en charge, avec mon traitement. A Madrid, des associations me venaient en aide.»
«Mouhamadou m’a remis le billet pour Madrid aux Parcelles Assainies»
Dans ce trou noir, Arona se confie à un de ses collègues, Victor qui le met en rapport avec un Blanc du nom de José. Lequel lui a remis la drogue. «Il m’a payé le billet d’avion pour le Sénégal, me disant d’avaler les boulettes. Et c’est aux Parcelles Assainies que Mouhamadou m’a remis le billet pour Madrid. Une fois à l’aéroport de Dakar, j’ai commencé à vomir et les policiers m’ont demandé si j’avais avalé quelque chose, j’ai dit oui, ils m’ont emmené avec eux et j’ai expulsé les boulettes.» Le parquet qui dit émettre des réserves sur son état de santé, pense que si cette maladie est avérée, c’est son activité de mule qui doit en être à l’origine. «Il dit dans son expression ‘Gars yi’, donc, c’est une association de personnes qui trafiquent.» Pour Me Malick Mbengue, la maladie de son client est bien réelle. Et c’est pour rester en vie qu’il a accepté de transporter ce produit en Espagne. Plaidant des circonstances atténuantes, il n’a pas atteint la fibre sensible du juge, Magatte Diop et de ses assesseurs.

IGFM



Abdoul Aziz Diop